Les tensions entre l’Alliance des États du Sahel (AES) et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) prennent une nouvelle tournure. Le Mali, le Niger et le Burkina Faso, regroupés sous l’AES et gouvernés par des régimes militaires hostiles à la France, ont fermement rejeté le délai de six mois accordé par la Cedeao pour revenir sur leur décision de quitter l’organisation régionale.
En janvier 2024, les trois pays sahéliens ont officialisé leur volonté de se retirer de la Cedeao, qu’ils accusent d’être un instrument de domination de l’ancienne puissance coloniale française. Cette annonce est survenue dans un contexte marqué par une montée des tensions entre ces régimes militaires et la communauté internationale, en particulier la France, qu’ils jugent responsable d’ingérences multiples dans leurs affaires internes.
Lors d’un sommet tenu récemment à Abuja, la Cedeao a pourtant laissé une porte ouverte à ces pays en leur accordant un délai de rétractation de six mois après leur départ officiel prévu pour fin janvier 2025. Selon le président de la Commission de la Cedeao, cette période transitoire, qui s’étendra jusqu’au 29 juillet 2025, vise à maintenir le dialogue et à favoriser un retour des trois États dans le giron régional.
Cependant, dans un communiqué signé par Assimi Goïta, chef de la junte malienne, l’AES a dénoncé cette initiative, qualifiée de « tentative de déstabilisation » orchestrée par des « agendas étrangers » et soutenue par une minorité de chefs d’État de la région.
Les dirigeants des trois États sahéliens ont réaffirmé que leur décision de quitter la Cedeao était « irréversible » et ont rejeté toute mesure unilatérale prise par l’organisation régionale. Ils y voient une manœuvre visant à affaiblir leur projet politique et militaire commun, marqué par une alliance étroite avec des puissances comme la Russie.
Le communiqué de l’AES accuse également la France et ses alliés régionaux de chercher à saboter les efforts d’émancipation des pays sahéliens. Ces régimes militaires, qui ont expulsé les forces françaises de leurs territoires, dénoncent une ingérence visant à freiner leur coopération croissante dans les domaines militaire et économique.
Face à cette crise, certains États membres de la Cedeao, notamment le Sénégal et le Togo, tentent de jouer les médiateurs pour ramener le Mali, le Niger et le Burkina Faso au sein de l’organisation. Mais les efforts de conciliation semblent vains face à l’intransigeance des trois pays de l’AES, qui privilégient une nouvelle voie de coopération entre eux.
Parallèlement, ces pays sahéliens intensifient leur lutte contre les groupes jihadistes actifs dans la région, en s’appuyant sur des alliances stratégiques avec des puissances comme la Russie. Leur projet, axé sur une souveraineté renforcée, est présenté comme une alternative aux mécanismes traditionnels de la région, jugés inefficaces et biaisés.
La crise entre l’AES et la Cedeao met en lumière les fractures profondes qui traversent l’Afrique de l’Ouest. Elle pose également la question de la pertinence des organisations régionales face à des régimes en quête de nouveaux partenariats globaux.
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