Crise des médias au Sénégal : Le CDEPS dénonce un état de siège sur la presse privée

La Maison de la Presse Babacar Touré, symbole de l’information et de la liberté d’expression au Sénégal, a été le théâtre d’un événement inédit ce matin. Le Conseil des Diffuseurs et Éditeurs de Presse du Sénégal (CDEPS) s’est vu refuser l’accès à la salle de conférence où devait se tenir un point de presse crucial sur la crise profonde que traverse le secteur des médias privés. Une situation dénoncée avec vigueur par le président du patronat de la presse sénégalaise, Mamadou Ibra Kane, qui accuse les autorités d’étouffer délibérément la presse privée.

Depuis l’arrivée au pouvoir de Bassirou Diomaye Faye en mars 2024, le secteur des médias sénégalais connaît une détérioration sans précédent. Selon le CDEPS, des décisions économiques et administratives hostiles traduisent une volonté claire de marginaliser les entreprises de presse privées.

Lors de son intervention devant un parterre de journalistes réunis devant la Maison de la Presse, Mamadou Ibra Kane a mis en lumière les difficultés financières accrues auxquelles font face les médias privés. Parmi les principaux griefs, le patronat de la presse dénonce :

• Le refus d’effacement fiscal pour les entreprises touchées par la crise du Covid-19.

• L’absence de moratoires sur les dettes fiscales et sociales.

• La saisie des comptes bancaires de plusieurs organes de presse suite à des poursuites judiciaires.

À cela s’ajoute le non-paiement par l’État de dettes colossales envers les médias privés, estimées à plusieurs milliards de francs CFA. Ces dettes concernent notamment des contrats publicitaires annulés unilatéralement et des subventions à la presse pour l’année 2024 qui n’ont jamais été versées.

« Ces mesures ne sont pas accidentelles. Nous sommes face à une stratégie réfléchie pour liquider la presse privée au Sénégal », a martelé Mamadou Ibra Kane.

Outre l’asphyxie économique, le CDEPS dénonce une offensive administrative visant à restreindre la liberté d’expression. Désormais, seuls les médias agréés par le ministère de la Communication peuvent opérer légalement, une disposition qui exclut de facto plusieurs entreprises de presse.

Le refus d’accès à la Maison de la Presse illustre, selon le CDEPS, une escalade des tensions entre le gouvernement et les médias. Mamadou Ibra Kane a souligné l’absence de réponse de la direction de la Maison de la Presse, malgré les démarches habituelles pour organiser l’événement. « C’est une volonté manifeste de museler nos voix », a-t-il déclaré.

Le Sénégal, longtemps considéré comme un modèle de démocratie en Afrique de l’Ouest, voit sa réputation entachée par ces atteintes à la liberté de la presse. « La presse est un pilier de la démocratie. La priver de ressources et de libertés, c’est menacer l’ensemble de la société sénégalaise », a averti Mamadou Ibra Kane.

Face à cette situation alarmante, le CDEPS appelle à une mobilisation nationale et internationale pour défendre le pluralisme médiatique et l’indépendance de la presse au Sénégal. Le patronat espère un soutien fort de la communauté internationale et des organisations de défense de la liberté de la presse pour faire pression sur le gouvernement sénégalais.

La crise actuelle marque un tournant pour le secteur des médias privés au Sénégal. Les acteurs de la presse sont plus que jamais déterminés à se battre pour préserver leurs droits et leur indépendance. Alors que la bataille ne fait que commencer, l’avenir de la liberté de la presse au Sénégal reste incertain, et les regards sont tournés vers le gouvernement pour un éventuel dialogue.


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