TRIBUNE DU WEEK-END : Pourquoi les Sénégalais émigrent-ils ?

Par Abdoul Aziz DIOP

Se prononçant, le 6 juillet 2024 à l’’Université Gaston Berger de Saint-Louis sur «le naufrage meurtrier – [près de 90 personnes périssent sur un total de 170 passagers partis de Niodior] – d’un bateau de migrants au large de la Mauritanie, alors qu’ils tentaient de rallier les côtes espagnoles des Canaries», le Premier ministre Ousmane Sonko appelle la jeunesse à rester en Afrique. Analysée sérieusement, l’exhortation faite à la jeunesse sénégalaise par Sonko renvoie quoique courte à une analyse sans rides faite 25 ans plus tôt.

Le mot de la spécialiste des migrations

Le Monde diplomatique publie, en novembre 2000, une remarquable tribune de Saskia Sassen intitulée «Mais pourquoi émigrent-ils?» A la question, suscitée par «le travail mondialisé», la sociologue trouva les réponses inédites sous le prisme desquelles, nous examinâmes l’intervention de l’ancien président français, Jacques Chirac, au sommet Afrique-France, qui s’est tenu du 3 au 4 décembre 2005 dans la capitale malienne. Au mépris du thème central de la réunion – «la jeunesse africaine: sa vitalité, sa créativité, ses aspirations» -, Chirac parle surtout d’immigration.
L’ancien président français, Jacques Chirac, innovait-il vraiment à cette réunion lorsqu’il se disait prêt à accorder des «visas de longue durée» aux «chefs d’entreprise», aux «professeurs», aux «chercheurs», aux «cadres» et aux «artistes» africains ? Pas autant qu’on pouvait l’espérer en tout cas. «L’ami [d’alors] de l’Afrique» avait sans doute à l’esprit la gestion, dans les postes consulaires de son pays, des files d’attente selon des «critères d’âge, de diplômes, de connaissance linguistique et d’expérience professionnelle», définis par l’ancien ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy. Ce dernier annonçe, bien avant le sommet de Bamako, «la mise en place d’une mission d’évaluation des capacités d’accueil et des besoins économiques de la France, qui [devrait] remettre ses conclusions [en] mars 2006». A la tribune du Palais des congrès de Bamako, Jacques Chirac claironne «l’immigration choisie» par Sarkozy et de Villepin. «L’avenir des jeunes africains est d’abord en Afrique», déclare-t-il à l’attention des 53 délégations africaines qui firent le déplacement. Contrairement au chef de l’État malien qui se contenta de s’exclamer «Jacques, tu es vrai !», les intentions de M. Chirac en matière d’immigration n’échappèrent pas aux rédactions de Radio France internationale (RFI) et de la chaîne de télévision francophone TV5 MONDE. En juin 2004, le président Wade s’en prenait, lui, aux «niches de gaspillage» et préconisait «le contre-transfert des cerveaux» (du Nord au Sud plutôt que l’inverse), les «passeports d’affaires» et «la suppression des pots-de-vin». On sait très bien ce qu’il en reste aujourd’hui.

La tribune de la sociologue Saskia Sassen sur les flux migratoires montre que la jeunesse africaine, en raison justement de sa «vitalité», de sa «créativité» et de ses «aspirations» s’invitera encore longtemps dans les débats sur l’immigration. «Jadis chefs de terre, les patriarches [des] familles Touré et Niaré (…) [du Mali], sont aujourd’hui confinés dans des rôles de chefs de quartier ou d’imams. De génération en génération, certaines branches ont prospéré et répandu leurs patronymes dans la sous-région. D’autres végètent dans leur immuable carré de Bamako. Aujourd’hui, le grand chef des terres, c’est l’État. Et les bailleurs de fonds le pressent de privatiser tout ce qui peut l’être, à coup de Plans d’ajustement structurel (PAS)», écrit Monique Mass, journaliste à RFI. Saskia Sassen montra, entre autres, comment de telles mesures dans les pays du Sud dopent les flux migratoires.
En faisant irruption dans bien des créneaux porteurs pour les couches urbaines et rurales pauvres des pays en développement, certaines sociétés multinationales limitent «les perspectives de survie» et créent «une main-d’œuvre mobile». Les flux de migrants consécutifs aux conflits en Afrique sont révélateurs de la responsabilité des gouvernements des pays concernés et de certains gouvernements étrangers dont celui de la France.

En recevant sur son territoire des ressortissants français fuyant la Côte d’Ivoire en guerre, la France se trouva confrontée à une obligation dont elle se passerait en temps normal. Les migrants pouvaient bien être d’une autre nationalité. Il ne fait aucun doute qu’«il est (…) plus compliqué de tenir compte de l’impact des activités extérieures des États sur la constitution des flux migratoires que de voir dans l’émigration une simple conséquence de la pauvreté, le résultat du choix individuel des émigrants». «L’observation, sur le terrain, des causes de l’émigration tend à prouver que les flux s’inscrivent dans le temps et l’espace, et qu’ils dépendent largement des politiques menées dans d’autres sphères. De nombreuses études universitaires dans le monde entier l’attestent : il ne s’agit ni d’invasions de masse ni de mouvements spontanés de la pauvreté vers la richesse».
«Si l’Etat-nation dispose toujours du pouvoir d’écrire le texte d’une politique de l’immigration, ses différentes obligations internationales font que sa politique de l’immigration, au sens conventionnel de cette expression, n’affecte qu’à la marge les réalités migratoires». C’est que «par-delà la mondialisation de l’économie, précisait Saskia Sassen, une autre transformation majeure des relations internationales contrebalance le pouvoir des États en matière de contrôle de l’immigration : la montée en puissance des régimes juridiques liés aux droits humains, dans le cadre des États ou de conventions internationales». «(…) En confinant sa politique migratoire à la seule dimension policière, l’État voit se multiplier les contentieux plus que s’affirmer ses capacités de régulation des flux. (…) D’un côté, tout pousse au multilatéralisme et, de l’autre, le traitement des problèmes d’immigration demeure unilatéral : cette contradiction est surmontée par la croissance de facto (plutôt que de jure) du bilatéralisme et du multilatéralisme dans la gestion de certains aspects spécifiques des migrations internationales», ajoutait-elle.
«Les problématiques d’éducation, de formation et d’emploi méritent une réflexion à la fois nationale, dans les différents pays, et internationale, afin de faciliter les passerelles qui permettent à la jeunesse d’Afrique de concevoir un parcours professionnel entre plusieurs pays voire plusieurs continents», soutenait Saskia Sassen. Mais à Bamako, «l’immigration choisie» sonna, une fois encore, le glas du «dialogue franco-africain» dont Jacques Chirac présida le dernier en tant que chef d’État français.
Plusieurs ONG maliennes choisirent alors de défendre un point de vue altermondialiste dans un «sommet alternatif citoyen Afrique-France», un rassemblement franco-panafricain organisé en contrepoint au sommet des chefs d’État. «Sans emplois productifs fournis à une échelle suffisante, il n’y aura pas de développement l», rappela un participant. Il est vrai que le Mali ne paraissait toujours pas avoir tiré de profit durable de la kyrielle de petits projets montés par les très nombreuses ONG étrangères bien que ces dernières se soient multipliées depuis le début des années 90, lorsqu’un vent démocratique a soufflé sur le pays.

À l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, Ousmane Sonko avait laissé entendre que «nous n’accepterons plus que nos ressources naturelles soient pillées pour nous laisser la pauvreté et le chômage qui va vous pousser à partir, vous les jeunes». En même temps, le chef du gouvernement n’est pas sans savoir qu’au Sénégal la crise que traverse la pêche artisanale montre comment les flux migratoires dépendent, dans une large mesure, des politiques menées par l’Union européenne. Au pays de la Téranga les jeunes, sommés de rester au pays, migrent donc comme le poisson parti on sait bien où. Celui qui n’accepte plus que nous ressources halieutiques soient pillées connaît donc au moins une direction à prendre parmi celles indiquées, il y a un quart de siècle maintenant, par l’universitaire Saskia Sassen dans les colonnes du très sérieux mensuel français diffusé en 25 langues.

A. A. DIOP

TRIBUNE DU WEEK-END : Les sports pour encourager Ousmane SONKO à comparaître

À quoi sert un grand événement sportif de taille continentale comme la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de football ? Rien d’autre qu’une contrainte de calendrier qui voulait que le Sénégal, dernier vainqueur de la Coupe, remît en jeu son trophée pour le reconquérir – aventure ratée – en janvier 2024 en Côte d’Ivoire, devant les meilleures équipes d’Afrique. C’était déjà beaucoup ! Mais ne l’oublions pas ; le football est bien le sport roi et à ce titre il a un effet d’entraînement sur tous les autres sports. D’où l’intérêt pour chaque premier ministre nouvellement nommé par décret présidentiel de faire preuve de fair play et de donner de vrais gages sportifs au monde du sport dont nous faisons tous partie d’une manière ou d’une autre.

Unification des sports

Le 5 décembre 2017, l’ancien Premier ministre du Sénégal Mahammed Boun Abdallah DIONNE (Paix à son âme) prononça son deuxième discours de politique générale à l’Assemblée nationale après celui de novembre 2014. DIONNE 2, à pied d’œuvre, dit alors son ambition pour les sports, tous les sports. «Un accent particulier sera aussi mis sur la promotion du sport scolaire et universitaire et sur la promotion de toutes les disciplines sportives, sur l’ensemble du territoire. Le nouveau code du sport sera adopté et des conventions d’objectifs seront signées avec les fédérations nationales sportives, d’ici à 2019», avait déclaré l’ancien Premier ministre. L’ancien ministre des Sports, Matar BA, se chargea de l’explication de texte en des termes clairs : «Quand on aura ce code du sport, on ne va plus parler de sponsors qui ne participent pas, de manque de moyens, mais on va parler de professionnalisme, de projets montés qui permettent d’aller de l’avant, de vivre efficacement la dimension économique du sport.» Pour l’ancien champion d’Afrique de football, Matar BA, l’année 2019 était la date butoir – à ne pas dépasser – de publication du nouveau code. La suppression du poste de chef de gouvernement plomba depuis le projet grâce auquel devaient être assurés l’unification de la loi spécifique au sport et l’accès, par une porte d’entrée unique, aux autres codes. Où en sommes-nous cent jours après l’entrée en fonction du seizième chef de gouvernement du Sénégal, Monsieur Ousmane SONKO, depuis 1970 ?

Amadou BA toujours pour l’amateurisme

Cinq ans après Mahammed Boun Abdallah DIONNE, Amadou BA fait, le 12 décembre 2022. sa déclaration de politique générale devant les députés nouvellement élus. Pas un mot sur la proposition d’une charte du sport par la Commission Culture, Art, Jeunesse et Sport du dialogue national et à la demande de finalisation, en février 2022 en conseil des ministres, du projet de loi relative à ladite charte. Pas un mot évidemment sur le code du sport, donnant libre cours à ce que redoutait l’ancien ministre Matar BA en déclarant, peu après Mahammed Boun Abdallah DIONNE, que «sans ce code du sport, on ne peut pas avancer parce qu’on sera dans l’amateurisme et ce n’est pas l’amateurisme qui peut développer le sport».
Il y a très peu, le 28 octobre 2023, un universitaire – le Professeur agrégé de droit et spécialiste des droits du sport et de l’économie Abdoulaye SAKHO – monte au créneau pour soutenir, par la réflexion, l’auteur de la déclaration de politique générale de décembre 2017 en présentant son livre au public venu nombreux l’écouter au King Fahd Palace à Dakar. «Le droit au soutien de l’investissement dans le sport : Eléments pour le code du sport du Sénégal !» C’est par ce titre et sous-titre que le Professeur SAKHO conforta la politique sportive de l’ancien candidat de la coalition DIONNE 2024 à la dernière élection présidentielle. «Le sport s’est transformé en une activité économique qui nécessite un soutien accru du gouvernement pour assurer son organisation, son développement, et promouvoir un meilleur accueil des investissements», résume le portail d’informations sur le Sénégal, Seneplus, dans son compte rendu.

Pour tous les sports, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, Président et premier coach du pays, sait-il où il va plus de cent (100 jours) maintenant après son accession à la magistrature suprême ? Son Premier ministre, Ousmane SONKO, dont il dit qu’il est «le meilleur des chefs de gouvernement» depuis 1970, serait-il enfin encouragé par tous les sports, encore en attente d’un code unificateur, pour comparaître au tribunal législatif où il est attendu depuis sa nomination il y a maintenant plus de trois mois ? Après sa comparution, le chef du gouvernement fera-t-il mieux que son prédécesseur Amadou BA ? En relisant la deuxième déclaration de politique générale de Mahammed Boun Abdallah DIONNE et l’ouvrage du Professeur SAKHO, il y sera sans aucun doute encouragé.

Par Abdoul Aziz DIOP

NOUVEAU POSTE AU LENDEMAIN DU 02 AVRIL : Macky Sall ne trouve pas le temps de chômer

Le président de la République, Macky Sall, est décidément une véritable bête de travail. Alors que ses fonctions à la tête du Sénégal prennent fin dans quelques jours, le chef de l’État ne pense pas s’offrir le luxe de prendre une année sabbatique.


Macky Sall est déterminé à ne pas prendre sa retraite de manière traditionnelle après ses services rendus à la nation sénégalaise. En effet, très dynamique et prêt à affronter de nouveaux défis après la fin de son second et dernier mandat le 2 avril 2024, le quatrième président de la République du Sénégal s’engage dans une nouvelle aventure. Le chef de l’État, remplacé par Bassirou Diomaye Faye, ce 24 mars, a trouvé une voie de reconversion professionnelle, faisant une annonce importante sur son plan de carrière post-présidentiel.
Dès la fin de son mandat présidentiel, Macky Sall se lance directement dans une nouvelle mission en prenant la tête du Pacte de Paris pour les peuples et la planète (4P).


Nommé envoyé spécial du Pacte de Paris pour les peuples et la Planète (4P) par son homologue français, Emmanuel Macron, semble se plaire à son nouveau rôle international du moment où il a affirmé prendre fonction de ses nouvelles responsabilités dès la fin de son mandat, ce 02 avril.
La demande lui a été présentée lors du Forum de Paris sur la paix qui s’est tenu les 10 et 11 novembre 2023 dans la capitale française.


En visioconférence avec Emmanuel Macron hier, mardi, les discussions entre Macky Sall et le secrétariat des 4P ont porté sur les défis à venir dans son nouveau rôle et sur l’agenda à mettre en place pour dérouler son programme.


Suite à cette téléconférence, les services de communication de la Présidence de la République publié sur leurs réseaux sociaux : « Désigné envoyé spécial du 4P (Pacte de Paris pour les peuples et la Planète), le Président de la République, Macky Sall entrera en fonction dès la fin de son mandat le 2 avril. En visioconférence ce matin avec le chef de l’État, le secrétariat des 4P s’impatiente. La séance de travail a porté sur l’agenda et les enjeux auxquels le président Macky Sall est attendu ».


Cette nomination intervient à un moment crucial, juste après les élections qui ont désigné son successeur, Bassirou Diomaye Faye, surtout après son mandat présidentiel de douze ans.


L’acceptation de ce nouveau rôle démontre l’engagement du président de la République, Macky Sall, envers les questions écologiques et son désir de continuer à contribuer à l’échelle mondiale même après son mandat présidentiel.


De manière générale, Macky Sall aa toujours prouvé un attachement continu envers des causes mondiales telles que la préservation de l’environnement et le bien-être des populations.


La date prévue pour la passation du pouvoir entre les chefs d’État, Macky Sall et Bassirou Diomaye Faye, le 2 avril 2024, marque un moment historique pour le Sénégal. Cette transition pacifique est capitale pour la stabilité et la démocratie du pays.

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