Flou autour d’un projet d’électrification rurale : 2,4 milliards FCFA introuvables, enquête ouverte en Espagne

Un vent de soupçons souffle sur un projet d’électrification rurale au Sénégal, dans lequel une avance de démarrage de 2,425 milliards de francs CFA aurait été indûment versée à la société espagnole AEE Power EPC, sans que les travaux n’aient débuté. Cette affaire, rapportée par Le Quotidien, soulève de graves interrogations sur la gestion des fonds publics et la transparence des marchés internationaux.

Selon les informations recueillies, ce montant a été débloqué dans le cadre d’un contrat entre l’Agence sénégalaise de l’électrification rurale (ASER) et la société espagnole AEE Power EPC. Pourtant, les travaux prévus dans le cadre de ce marché, censé améliorer l’accès à l’électricité de 600 000 personnes dans plusieurs régions sénégalaises, n’avaient pas encore commencé au moment du versement.

Plus inquiétant encore, des transferts financiers suspects ont été identifiés par les autorités espagnoles vers Chypre, l’Égypte et le Sénégal. Ces mouvements de fonds jugés irréguliers ont conduit à l’ouverture d’une enquête de la police espagnole, qui cherche à retracer la destination exacte des sommes avancées.

Cette affaire n’est pas née dans l’opacité. En octobre 2024, l’Autorité de régulation des marchés publics (ARCOP) avait déjà suspendu le marché, dénonçant plusieurs zones d’ombre, notamment autour de l’utilisation de 37 milliards FCFA issus d’une offre spontanée présentée par AEE Power EPC. Malgré les alertes, une avance de 2,425 milliards FCFA avait tout de même été versée.

La banque Santander, principal bailleur de fonds du projet, et l’agence espagnole de crédit à l’exportation (Cesce), ont exprimé leur profonde inquiétude. Cesce a notamment suspendu son financement, évoquant un manque de transparence de la part de l’entreprise espagnole. Les avocats de AEE Power Sénégal, de leur côté, ont admis l’existence de transferts inexpliqués et ont eux-mêmes dénoncé des irrégularités internes, allant jusqu’à pointer une utilisation de l’avance à des fins étrangères au projet initial.

Malgré ce climat de suspicion, la Cour suprême du Sénégal, dans une décision rendue en février 2025, a annulé la suspension décidée par l’ARCOP. Ce feu vert judiciaire permet théoriquement la reprise du projet, au grand dam de plusieurs acteurs financiers et institutionnels toujours préoccupés par la traçabilité des fonds.

L’enquête menée en Espagne se poursuit, avec l’objectif de faire la lumière sur ces décaissements non justifiés, qui ternissent une fois de plus l’image de la coopération internationale dans le domaine des infrastructures essentielles.

Alors que des dizaines de milliers de foyers attendent toujours l’électricité, ce scandale soulève des questions fondamentales : à qui profite réellement l’électrification rurale ? Et surtout, qui devra répondre des fonds évaporés ?

Affaire à suivre.


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