Franz Beckenbauer, légende du football allemand, est mort à l’âge de 78 ans

Champion du monde en tant que joueur (1974) puis sélectionneur (1990), président du Bayern et grand organisateur du Mondial-2006 : pendant plus d’un demi-siècle Franz Beckenbauer  a rythmé le quotidien des Allemands devenant le « Kaiser » aux multiples facettes de l’Allemagne de l’après-guerre.

C’est une histoire que Franz Beckenbauer, décédé dimanche à l’âge de 78 ans, aimait raconter, une anecdote qui a influencé ses choix futurs. À 12 ans, le gamin du quartier populaire et ouvrier d’Obergiesing, dans le sud de la capitale bavaroise, découvre le foot depuis quelques années au SC 1906 Munich.

À l’été 1958, dans un tournoi de jeunes, il affronte le grand club munichois de 1860, qu’il doit rejoindre plus tard. Il a maille à partir pendant la rencontre avec l’un des joueurs des « Löwen », Gerhard König, qui lui met une gifle.

Après la rencontre, Beckenbauer prévient : il refuse d’aller dans « ce club de bagarreurs » et s’engage fièrement avec le rival, le Bayern. Le début d’une très longue histoire entre le Bayern et le jeune Franz, qui va devenir en quelques années le « Kaiser » (l’empereur) allemand.

Né en septembre 1945 dans les ruines de l’Allemagne d’après-guerre, fils d’un directeur de bureau de poste, Franz Beckenbauer rejoint le Bayern en 1964 alors qu’il n’a pas encore 19 ans, et y passe la majeure partie de sa carrière.

Il se créé sur mesure un poste adapté à son talent : libéro, évoluant derrière sa défense mais venant régulièrement faire le surnombre en milieu de terrain, d’où il a marqué la majorité de ses plus beaux buts.

Ce joueur racé et élégant, au port toujours altier, s’est bâti un palmarès exceptionnel : quatre titres de champion et autant de Coupe d’Allemagne, deux Ballons d’Or, trois succès d’affilée en Coupe d’Europe des clubs champions, l’ancêtre de la ligue des Champions.

Le bras droit en écharpe  

Avec la sélection, il a réalisé le doublé Championnat d’Europe (1972) et Coupe du monde (1974). Cerise sur le gâteau, le sacre planétaire a lieu chez lui, dans le stade olympique de Munich, à quelques encablures de sa maison natale.

Plus encore que Gerd Müller ou Sepp Maier, ses coéquipiers au sein de la Nationalmannschaft et du Bayern de Munich, Franz Beckenbauer a incarné la puissance du football allemand dans les années 1970.

Une photo est restée dans la légende, symbole de son abnégation : Beckenbauer, le bras droit en écharpe, continuant jusqu’au bout et malgré la douleur d’une clavicule cassée la demi-finale du Mondial-1970 perdue contre l’Italie (4-3 en prolongation), dans ce qui est resté le « Match du siècle ».

Il joue ses dernières saisons entre New York et Hambourg, avant de raccrocher en 1983 et de débuter une carrière d’entraîneur, lui qui affirmait comme joueur qu’il n’en avait pas la moindre intention.

Appelé au chevet de la Mannschaft à l’été 1984 après un Euro en France manqué, il hisse la sélection allemande en finale du Mondial-1986, perdue contre l’Argentine de Maradona, avant de prendre sa revanche quatre ans plus tard, contre cette même Argentine, à Rome.

Beckenbauer s’inscrit ainsi dans la légende, devenant le deuxième homme champion du monde comme joueur et sélectionneur, après le Brésilien Mario Zagallo. Le Français Didier Deschamps, qui comme le Kaiser a soulevé le trophée de la Coupe du monde à domicile en 1998, a rejoint ce club très fermé en 2018.

Peu attiré par le banc d’entraîneur, il rend son tablier de sélectionneur au sommet, et d’entraîneur après un court passage à Marseille.

Soupçons de corruption

C’est en revanche tout logiquement qu’il prend les rênes de « son » Bayern au début des années 1990, au sein d’un triumvirat aux côtés de Karl-Heinz Rummenigge et Uli Hoeness. Il double parfois sa casquette de président avec celle d’entraîneur intérimaire à deux reprises, avec succès.

Sollicité de toutes parts, il siège au comité exécutif de la Fifa, et l’Allemagne lui confie la mission d’obtenir l’organisation de la Coupe du monde 2006, qu’il décroche en 2000 lors d’un vote serré aux dépens de l’Afrique du Sud (12 à 11).

Le « Sommermärchen », un conte de fées d’été, de 2006 tourne toutefois une décennie plus tard au cauchemar, lorsque des soupçons de corruption viennent écorner un temps l’image du Kaiser.

« Les Allemands souhaitaient obtenir le Mondial, y compris moi. Et nous étions contents d’avoir un Franz Beckenbauer. Il y a un peu d’hypocrisie, on devrait nous tous s’auto-accuser », a récemment estimé l’ancien ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer (Verts).

Beckenbauer sera également suspendu pendant 90 jours par la Fifa de toute activité dans le football (sanction levée au bout de 14 jours), lui l’ancien vice-président de l’instance entre 2007 et 2011 au moment de l’attribution polémique du Mondial 2022 au Qatar en décembre 2010.

Omniprésent dans les médias et à la télévision, star de la publicité pendant et après sa carrière de joueur, Beckenbauer a vu son image, seulement un temps, écornée par ces soupçons.

Avec AFP


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