La crise dans le secteur des médias au Sénégal atteint un nouveau palier avec la coupure du signal de plusieurs chaînes de télévision par la société de diffusion TDS/SA. En cause, selon l’entreprise, le non-paiement des redevances mensuelles, une situation qui met en lumière les difficultés financières du secteur.
Parmi les chaînes affectées figurent des médias majeurs tels que RDV, WALF TV, ITV, TOUBA TV, AFRICA 7 et Bantamba TV. Selon TDS/SA, cette décision a été prise en collaboration avec le ministère de la Communication, et repose sur un « non-respect des obligations financières ».
Cependant, les responsables des médias concernés dénoncent une mesure brutale et unilatérale. Contacté par téléphone, Alassane Samba Diop, Directeur Général du groupe Emedia Invest, s’indigne :
« Nous nous sommes réveillés un beau jour et on nous a coupé le signal sans préavis, sans sommation. En effet, Amadou Diop, qui était directeur de la TDS/SA, nous avait demandé de supporter les coûts de diffusion via la Sonatel, en nous assurant qu’ils nous rembourseraient par la suite. Nous avions d’ailleurs fourni toutes les factures comme preuves. Aujourd’hui, nous constatons qu’il y a une volonté manifeste de réduire toutes les télévisions au silence et de créer des chômeurs. Ces gens ne veulent pas accompagner les entreprises privées. Nous dénonçons cette mesure unilatérale. »
Les difficultés économiques des chaînes de télévision ne datent pas d’hier. Depuis plusieurs années, les médias sénégalais peinent à assurer leur rentabilité face à la baisse des revenus publicitaires et aux coûts élevés de diffusion. La digitalisation et l’émergence des plateformes de streaming ont également bouleversé le modèle économique traditionnel.
En 2023 déjà, WALF TV avait vu son signal suspendu pour des raisons similaires, provoquant une vague d’indignation dans le paysage médiatique. Les professionnels du secteur estiment que ces sanctions financières cachent des motivations politiques visant à limiter l’influence de certaines chaînes critiques envers le pouvoir.
Dans un contexte marqué par des tensions politiques et sociales, cette coupure des chaînes de télévision suscite des inquiétudes quant à la liberté de la presse au Sénégal. Pour Babacar Touré, analyste des médias, cette situation s’inscrit dans une tendance inquiétante :
« L’État utilise l’argument financier pour justifier ces coupures, mais il est évident que certaines chaînes dérangent. Les médias privés jouent un rôle essentiel dans l’équilibre démocratique du pays. S’ils disparaissent, c’est toute la liberté d’expression qui est menacée. »
Face à cette crise, les chaînes concernées pourraient être contraintes de négocier avec les autorités pour un rétablissement de leur signal. Cependant, la question du financement des médias reste un défi majeur qui nécessite une réforme structurelle.
Le Syndicat des Professionnels de l’Information et de la Communication du Sénégal (SYNPICS) a déjà annoncé une réunion d’urgence pour examiner la situation et proposer des actions. De son côté, le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal (CDEPS) appelle à une concertation avec les autorités afin de trouver une solution durable qui éviterait de nouvelles fermetures.
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