SURPOPULATION CARCÉRALE : Dans l’enfer des geôles sénégalaises

Avec un taux d’occupation moyen de 267 % et une capacité d’accueil de 4 833 places pour 12 910 détenus en 2023, les prisons sénégalaises sont en état de surpeuplement critique. En parallèle, le manque de personnel pénitentiaire aggrave la situation : avec un ratio d’un surveillant pour 11 détenus, le Sénégal est loin des normes des Nations unies, qui recommandent un surveillant pour deux prisonniers.

Les prisons sénégalaises sont confrontées à une crise de surpopulation qui atteint des niveaux alarmants. D’après le dernier Rapport global portant Situation Économique et Sociale publié par l’Ansd (Agence nationale de la statistique et de la démographie), notre pays compte, en 2023, 37 établissements pénitentiaires, répartis en quatre catégories : 32 maisons d’arrêt et de correction, dont une réservée aux femmes (MAC Rufisque), 2 maisons d’arrêt (Rebeuss et Liberté VI), 1 maison de correction (Sébikotane) et 2 camps pénaux (Liberté VI et Koutal). Ces infrastructures accueillent différentes catégories de détenus selon la nature et la durée de leur peine. Mais, elles sont aujourd’hui largement submergées par la réalité carcérale.
En effet, pour une capacité d’accueil réelle de seulement 4 833 places, les prisons sénégalaises comptent, en 2023, un total de 12 910 détenus, soit un taux d’occupation moyen de 267 %. Certaines régions atteignent des niveaux encore plus alarmants, comme Kédougou avec un taux d’occupation de 501 %, suivie de Saint-Louis (366 %), Sédhiou (359 %) et Matam (305 %). Même Dakar, qui regroupe une proportion importante des infrastructures pénitentiaires du pays, dépasse les 300 % d’occupation. À l’échelle nationale, seules les régions de Kaffrine (168 %) et Ziguinchor (112 %) affichent des taux inférieurs à 200 %, mais ces chiffres restent bien au-delà des normes acceptables.

Un grave déficit en personnel, loin des standards internationaux

En plus du problème de surpopulation, les prisons sénégalaises souffrent d’un manque criard de personnel pénitentiaire, compromettant davantage la gestion et la sécurité des établissements. En 2023, l’effectif total du personnel pénitentiaire s’élevait à 2 290 agents, dont 1 923 hommes (84 %) et 367 femmes (16 %). La majorité d’entre eux (87 %) exercent en tant que surveillants, tandis que les autres sont affectés à des tâches administratives (7,9 %) ou au contrôle (2,7 %). Il est également à noter que les femmes sont nettement sous-représentées dans toutes les catégories professionnelles, ce qui limite leur présence dans la surveillance et la gestion des établissements accueillant des détenues.
Le manque de personnel pénitentiaire est particulièrement alarmant lorsqu’on le compare aux normes internationales. Avec un ratio d’un surveillant pour 11 détenus, le Sénégal est très loin des standards établis par les Nations unies, qui recommandent un surveillant pour deux détenus.
De plus, le manque de personnel ne permet pas d’assurer un suivi individualisé des détenus. Ce qui nuit aux efforts de réhabilitation et de réinsertion. Sans un encadrement suffisant, les risques de récidive restent élevés, et le système carcéral peine à remplir son rôle de rééducation. L’insuffisance de personnel, couplée à une surpopulation massive, rend les prisons sénégalaises ingérables et alimente un cercle vicieux où les tensions, la violence et les mauvaises conditions de détention deviennent la norme.
Il est donc urgent que des mesures soient prises pour renforcer les effectifs du personnel pénitentiaire.
De manière globale, ces défis auxquels est confrontée la population carcérale peuvent avoir des conséquences dramatiques sur les conditions de détention. Les prisons, conçues pour accueillir un nombre bien plus restreint de détenus, pourraient facilement être des lieux insalubres et inadaptés. En effet, dans de telles conditions, il serait difficile d’assurer l’hygiène, les soins médicaux et un bon approvisionnement en eau. Dès lors, la promiscuité extrême favorise la propagation des maladies et pourrait engendrer des tensions permanentes entre détenus, rendant ainsi la gestion carcérale de plus en plus compliquée.
Face à cette urgence, il devient impératif de construire de nouveaux établissements pénitentiaires et d’adopter des mesures alternatives à l’incarcération.

Penda THIAM


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