Les députés britanniques adoptent le projet de loi pour expulser des migrants au Rwanda

Surmontant une tentative de fronde dans sa majorité, le Premier ministre britannique Rishi Sunak a obtenu mercredi le feu vert des députés à son projet de loi, controversé, visant à expulser au Rwanda les migrants clandestins. Le texte doit désormais être approuvé par la Chambre des Lords.

Victoire politique pour le Premier ministre Rishi Sunak qui a promis de mettre fin à l’arrivée des bateaux de migrants sur les côtes britanniques. Les députés britanniques ont adopté, mercredi 17 janvier au soir, le projet de loi controversé sur l’expulsion de migrants vers le Rwanda.

Le Premier ministre a surmonté une tentative de fronde dans sa majorité. Après deux jours sous haute tension au palais de Westminster avec débats houleux, tractations à huis clos et démissions retentissantes, les dissidents sont revenus dans les rangs du Parti conservateur et le texte a été approuvé en troisième lecture à la Chambre des Communes avec 320 votes pour et 276 contre.

C’est un soulagement pour Rishi Sunak. Largement devancé dans les sondages par les travaillistes en ce début d’année électorale, il a mis tout son poids dans la balance pour faire aboutir ce projet censé montrer sa fermeté sur une préoccupation majeure de sa base mais qui aura exposé à vif les divisions de sa majorité, les modérés redoutant une atteinte au droit international et les plus à droite voulant aller plus loin.

Ce texte vise à répondre aux objections de la Cour suprême britannique, qui a jugé le projet illégal dans sa version précédente par crainte notamment pour la sécurité des demandeurs d’asile envoyés au Rwanda.

Selon le projet, ces derniers, d’où qu’ils viennent, verraient leur dossier examiné au Rwanda et ne pourraient ensuite en aucun cas retourner au Royaume-Uni, ne pouvant obtenir l’asile que dans le pays africain en cas de succès.

Lors de son examen, des dizaines de députés conservateurs ont soutenu, en vain, des amendements visant à durcir le texte, tentant notamment de limiter le droit des migrants à faire appel de leur expulsion.

La tension est également montée d’un cran après la démission mardi de deux vice-présidents du parti conservateur, partisans d’une ligne plus dure, qui ont reçu le soutien de l’ancien Premier ministre Boris Johnson.

Un texte bloqué jusqu’à présent

Annoncé en avril 2022 par ce dernier, ce projet visait à décourager l’afflux de migrants dans des petites embarcations à travers la Manche : près de 30 000 l’an dernier après un record en 2022 (45 000).

Ce week-end, cinq migrants sont morts alors qu’ils tentaient de rejoindre une embarcation à la mer dans une eau glaciale. Mercredi matin, d’autres bateaux ont été vus en train de tenter cette traversée périlleuse, a constaté un photographe de l’Agence France-Presse (AFP).

Mais le texte n’a jusque-là jamais pu être mis en oeuvre. Un premier avion a été bloqué in extremis par une décision de la justice européenne, puis la justice britannique avait, jusqu’à la Cour suprême, déclaré le projet illégal dans sa version initiale.

Pour tenter de sauver son texte, vivement critiqué par les associations humanitaires, le gouvernement a signé un nouveau traité avec le Rwanda. Il est adossé à ce nouveau projet de loi qui définit le Rwanda comme un pays-tiers sûr et empêche le renvoi des migrants vers leurs pays d’origine.

Il propose également de ne pas appliquer aux expulsions certaines dispositions de la loi britannique sur les droits humains, pour limiter les recours en justice.

L’agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a estimé mercredi que la dernière version du projet n’était « pas compatible » avec le droit international.

L’avenir du projet de loi incertain

Le projet de loi devra désormais être approuvé par les membres non élus de la Chambre des Lords, qui pourraient fort bien l’amender.

Et s’il est adopté à temps avant les législatives, prévues en l’état à l’automne, le Labour, mené par Keir Starmer, a promis de l’abroger s’il arrive au pouvoir après 14 ans dans l’opposition.

Un durcissement trop important pourrait par ailleurs fragiliser le partenariat avec le Rwanda, qui a déjà reçu près de 240 millions de livres (280 millions d’euros) de la part du Royaume-Uni.

« Cet argent ne sera utilisé que si les (migrants) viennent. Si ce n’est pas le cas, nous pourrons le rendre », a assuré le président rwandais Paul Kagame, interrogé mercredi au Forum économique mondial à Davos (Suisse).

AFP

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