Dans un contexte électoral tendu au Sénégal, Ousmane Sonko, Premier ministre et chef du parti Pastef, suscite à la fois intérêt et questionnements. Son engagement affirmé de ne recourir à aucune ressource publique pour sa campagne électorale contraste avec la présence d’un dispositif sécuritaire impressionnant mis en place pour sa protection, avec le concours du Groupement d’intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). Cette situation interpelle sur l’équilibre entre l’utilisation des moyens publics pour des fonctions régaliennes et la gestion exemplaire des ressources qu’il promeut.
Le GIGN, force d’élite sénégalaise habituellement affectée à des missions de sécurité nationale, accompagne Ousmane Sonko dans ses déplacements, assurant sa sécurité rapprochée durant la campagne. Cette escorte particulière marque un contraste par rapport aux autres leaders politiques sénégalais, qui bénéficient rarement d’une telle protection de l’État en période de campagne. Sonko est suivi par cette unité d’élite depuis le départ de sa caravane de Dakar, un dispositif qui témoigne de l’importance accordée à la protection du deuxième personnage de l’État, mais qui ne manque pas d’interroger sur son impact dans le débat public.
Malgré ce dispositif, Sonko se veut garant de la transparence et de la gestion stricte des ressources publiques. Lors d’un direct sur sa page Facebook, il a d’ailleurs lancé un appel à ses sympathisants pour financer la campagne de Pastef par des contributions citoyennes, déclarant fermement : « Pas un seul franc de l’État dans notre campagne électorale ! ». Ce positionnement a pour objectif de montrer l’exemple, selon lui, pour améliorer la gestion des fonds publics par les acteurs politiques sénégalais. Cet appel est également un moyen pour Sonko de rester en phase avec sa base, qui le soutient pour son discours d’intégrité.
La question de la sécurité d’Ousmane Sonko n’est pas nouvelle. Lorsqu’il était dans l’opposition, il s’entourait d’une équipe de sécurité personnelle, qui, bien que souvent critiquée pour son interventionnisme, le protégeait lors de ses déplacements. Cet entourage a fait face à des épreuves judiciaires, notamment avec l’affaire de Tchicky en 2022, lorsque des membres de sa sécurité avaient été jugés pour des violences présumées. Depuis, même après l’accession de Pastef au pouvoir, ces anciens membres n’ont pas été laissés pour compte, ce qui souligne la loyauté de Sonko envers ses équipes. Cependant, aujourd’hui, c’est le GIGN qui assure la protection de l’homme politique dans le cadre de sa campagne, illustrant une adaptation de sa sécurité à son nouveau statut de Premier ministre.
Pour des figures de l’opposition, tel le député Cheikh Abdou Mbacké Bara Dolly, cette situation pose question. Il n’a pas hésité à commenter la position apparemment privilégiée de Sonko, déclarant que ce dernier « obtient tout ce qu’il demande. Comme un prophète. Il a même changé sa démarche ». Ces propos traduisent une pointe de jalousie, mais aussi une critique implicite du dispositif de sécurité mis en place autour de Sonko, perçu par certains comme un privilège.
Le cas d’Ousmane Sonko soulève des interrogations sur les ressources déployées pour assurer la sécurité des personnalités publiques en campagne, mais aussi sur la manière dont celles-ci peuvent respecter leurs engagements de transparence et de gestion rigoureuse des finances publiques. Alors que la campagne pour les Législatives de novembre avance, Sonko se positionne comme un leader politique prônant l’intégrité et l’exemplarité. Il reste cependant à voir si ce message sera pleinement compatible avec les moyens de protection mis à sa disposition par l’État, ou s’il ouvrira un débat sur les ressources publiques allouées aux leaders politiques, entre prérogatives de sécurité et exemplarité de gouvernance.