Le Sénégal vient de lever 450 milliards FCFA sur 7 ans au taux de 7,75%. Il a fallu deux jours pour cela. Or, notre pays avait emprunté 508 milliards FCFA à 5,375% sur 16 ans en un seul jour en 2021 sur ce même marché des Eurobonds.
Emprunter au même endroit moins d’argent à un taux plus élevé et un délai de paiement plus court est une contre-performance financière. Dans la haute finance, tout est dans le taux d’intérêt et le délai de paiement.
Si vous êtes obligé d’emprunter au taux le plus élevé avec le délai le plus court, cela veut dire que votre duo magique ne fonctionne pas. Ce duo magique? Performance et confiance.
Pour ce qui est de la performance, les marchés financiers se fondent sur leurs propres critères : notation souveraine, PIB, taux de croissance projetés, endettement/PIB, capacités de remboursement, environnement des affaires, réputation ou autres. Tout cela inspire ou pas confiance aux marchés financiers dont les taux et délais dépendent essentiellement de ces performances attestées par des agrégats indiscutables. La capacité à négocier est non négligeable.
Les marchés financiers ne font de cadeau à personne et font payer le prix fort à ceux qui ne présentent pas un duo magique reluisant.
En 2012, la dette du Sénégal s’élevait à 3.000 milliards FCFA environ, alors qu’elle est de 13.000 milliards FCFA en 2024. Ainsi, le Sénégal a emprunté environ 10.000 milliards FCFA sous l’ère Macky Sall, ce qui est 833 milliards par an.
Or, hormis les 450 milliards issus des Eurobonds, le Sénégal avait déjà contracté 324 milliards FCFA au mois d’avril; il y a une nouvelle enveloppe étalée de 1.150 milliards que le FMI devrait débloquer à partir de juillet 2024, ce qui fera 1.924 milliards en trois mois ou 641 milliards par mois en moyenne. Macky Sall empruntait 833 milliards par an ou 69 milliards par mois. A cette cadence, les 10.000 milliards de Macky Sall sous 12 ans seront égalés en…15 mois. Cette frénésie d’endettement n’est guère soutenable et est contraire à toute velléité de souveraineté économique.
Nous avons déjà atteint 80% de ratio par rapport à notre PIB dépassant le seuil de 70% fixé par les critères de convergence de l’UEMOA. L’endettement a, théoriquement et pratiquement, atteint ses ultimes limites.
La roue économique doit être accélérée par l’animation, l’incitation et la stimulation endogènes tous azimuts pour faire revenir le duo magique : performance et confiance.
Mamadou Sy Tounkara