Un scandale financier d’envergure éclabousse l’ancien ministre de l’Industrie, aujourd’hui maire de Louga et président de la coalition Farlu, Moustapha Diop. Cette affaire, révélée par PressAfrik, implique également l’inspectrice du Trésor Tabaski Ngom, accusée d’avoir détourné plus de 734 millions de francs CFA des caisses de la Commission de Régulation du Secteur de l’Énergie (CRSE) pour financer des activités politiques et des marchés fictifs.
Entre août et décembre 2024, Tabaski Ngom, alors Agent Comptable Particulier (ACP) de la CRSE, aurait opéré plusieurs prélèvements non autorisés sur les comptes de l’institution. Ces fonds, destinés à des projets fictifs et des activités électorales, auraient transité par des intermédiaires, dont Mor Guèye, propriétaire de l’entreprise Sen Setal Web Com. Selon les investigations, une partie de ces fonds – plus de 300 millions de francs CFA – aurait été remise à Moustapha Diop pour financer sa campagne législative anticipée du 17 novembre dernier.
En tant qu’ACP, Tabaski Ngom avait la charge de la gestion des comptes de la CRSE. Toutefois, après son limogeage en octobre 2024, elle aurait continué à effectuer des prélèvements illégaux sous couvert de certificats médicaux retardant sa passation de service. PressAfrik rapporte que l’agent a utilisé ces fonds pour financer des « marchés » qui n’ont jamais été exécutés.
Tabaski Ngom aurait remis 210 millions de francs CFA à Moustapha Diop par l’intermédiaire de son chauffeur et de Mor Guèye. Ce dernier, placé en garde à vue et déféré au parquet le 14 janvier, est accusé de faux en écriture et usage de faux. Il aurait fabriqué de fausses quittances de versements et détourné une partie des sommes confiées.
PressAfrik dispose de plusieurs éléments incriminants, notamment des audios, enregistrements, décharges et documents signés. Une décharge datée du 29 novembre 2024 mentionne que Moustapha Diop a reçu 210 millions de francs CFA de Tabaski Ngom, avec l’engagement de rembourser cette somme. Ce document porte la signature de l’ancien ministre et celle de l’agent du Trésor.
Dans une conversation enregistrée, Tabaski Ngom se plaint de la pression exercée par Moustapha Diop et son entourage pour obtenir des fonds supplémentaires. Elle confie vouloir sécuriser les fonds restants en attendant une preuve écrite signée devant notaire.
Mor Guèye, patron de Sen Setal Web Com, se décrit comme un intermédiaire ayant agi sur instruction de Tabaski Ngom. Il reconnaît avoir acheminé des fonds à Moustapha Diop, mais réfute toute accusation de détournement. « Je n’ai fait que suivre ses ordres. Tout l’argent que j’ai convoyé a été remis, et je peux en fournir la traçabilité », déclare-t-il.
L’enquête révèle que les fonds détournés provenaient des caisses publiques de la CRSE. L’organe de régulation, rattaché à la présidence de la République, a découvert les irrégularités lors d’un rapprochement bancaire. Une plainte a été déposée auprès du parquet financier le 11 décembre 2024.
À ce jour, Moustapha Diop n’a pas répondu aux sollicitations de la presse. Son implication dans cette affaire pourrait ternir davantage son image et celle de sa coalition, Farlu. Le dossier est actuellement entre les mains du parquet financier, et des poursuites pourraient être engagées contre tous les protagonistes impliqués.
Cette affaire met en lumière les failles dans la gestion des fonds publics au Sénégal, notamment dans les institutions stratégiques comme la CRSE. Elle pose également des questions sur l’intégrité des acteurs politiques et la capacité de l’État à prévenir et sanctionner les abus de pouvoir.