À l’issue d’un scrutin marqué par une mobilisation exceptionnelle, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, chef de la transition et désormais « président-candidat », semble en passe de consolider son pouvoir au Gabon. Les premiers résultats partiels diffusés par des médias officiels, notamment Gabon 24 et CTRI News, le placent largement en tête dans plusieurs provinces du pays.
Il s’agissait de la première élection présidentielle organisée depuis le coup d’État d’août 2023, qui a mis fin à plus de cinq décennies de règne de la famille Bongo. Pour la première fois, le général Oligui Nguema, qui avait promis un retour à l’ordre constitutionnel, se présentait devant les électeurs pour solliciter un mandat présidentiel de sept ans.
Samedi 12 avril, les Gabonais ont massivement répondu à l’appel des urnes. Le ministère de l’Intérieur a fait état d’un taux de participation de 87,21 % à 18h30, un chiffre qualifié d’« historique » par les analystes locaux. De longues files d’attente ont été observées devant les 3.037 bureaux de vote à travers le pays et dans la diaspora, signe d’un regain de confiance dans le processus électoral.
À Libreville, la capitale, l’ambiance était à la fois calme et empreinte d’espoir. « Ça faisait longtemps que je n’avais pas voté, mais cette fois-ci, j’ai senti que ça valait le coup », a confié Olivina Migombe, 58 ans, rencontrée à la sortie de la messe du dimanche des Rameaux. Comme elle, de nombreux citoyens affirment avoir voté pour Brice Oligui, dans l’espoir de voir enfin se matérialiser un changement attendu depuis longtemps.
Durant la nuit électorale, les images diffusées par la télévision publique ont montré des bulletins s’accumulant en faveur du candidat Oligui, les chiffres étant inscrits à la craie sur des tableaux noirs dans les centres de dépouillement. Dans plusieurs bureaux de vote, tant au Gabon qu’à l’étranger, des pourcentages atteignant 100 % en sa faveur ont été rapportés.
Le ministère de l’Intérieur, par la voix d’Hermann Immongault, devrait annoncer les résultats provisoires dans la journée de dimanche. Mais déjà, la tendance semble se dessiner : Oligui Nguema serait en route vers une victoire confortable face à ses sept adversaires, restés pour la plupart très discrets pendant la campagne. Son principal challenger, l’ancien Premier ministre Alain-Claude Bilie By Nze, n’a pas réussi à fédérer une opposition forte.
Fait notable : les autorités gabonaises ont autorisé, pour la première fois, les médias privés et internationaux à filmer le processus de dépouillement. Des observateurs internationaux, présents tout au long de la journée, n’ont signalé aucun incident majeur. Cette ouverture, saluée par plusieurs chancelleries étrangères, vise à restaurer la crédibilité des institutions électorales après des décennies de scrutins contestés.
Si la victoire de Brice Oligui Nguema venait à se confirmer, il devra rapidement s’attaquer à une série de défis structurels. Le pays, riche en ressources naturelles mais miné par des décennies de mauvaise gouvernance, reste confronté à un chômage endémique, des infrastructures dégradées, des pannes récurrentes d’électricité, des coupures d’eau, des hôpitaux et écoles en souffrance, ainsi qu’une dette publique estimée à plus de 73 % du PIB en 2024.
Les 2,3 millions d’habitants du Gabon, longtemps tenus à l’écart des décisions publiques, attendent désormais des résultats concrets. Le changement promis par Oligui Nguema ne pourra s’accomplir qu’au prix de réformes profondes, d’une lutte effective contre la corruption et d’un redressement des finances publiques.
En attendant la proclamation des résultats définitifs, l’heure est à l’observation prudente. Pour beaucoup de Gabonais, cette élection symbolise une rupture avec un passé politique lourd de frustrations. Reste à savoir si l’ancien général saura incarner durablement l’espoir de renouveau démocratique qui semble s’être exprimé dans les urnes.