Le Sénégalais et la nouvelle maladie du « selfitis »

La tendance du narcissisme en ligne, particulièrement visible à travers le phénomène du selfie, prend des proportions alarmantes. En Inde, depuis 2017, le selfie compulsif est classé parmi les troubles comportementaux graves, au même titre que la schizophrénie et les troubles bipolaires, selon le site des Inrocks. Au Sénégal, cette nouvelle pathologie continue de faire des victimes, révélant un mal-être profond dans notre société.

Récemment, un tragique accident sur l’autoroute a mis en lumière les conséquences dramatiques de cette obsession. Un proche d’une des victimes a dénoncé la passivité des témoins. « Tout le monde était occupé à filmer, personne n’est venu lui porter secours », a-t-il déploré. Ce cri de détresse reflète la gravité de la situation et les symptômes du « selfitis » qui se manifestent de manière inquiétante chez nous.

Aujourd’hui, il ne se passe plus un moment sans que quelqu’un n’appuie sur le déclencheur de son smartphone, obsédé par la recherche d’un « scoop ». Devenus des stars des réseaux sociaux, nous sommes prêts à tout pour satisfaire nos followers, peu importe la sensibilité des images. L’essentiel est de partager l’info, ou plutôt le « cas », le plus rapidement possible, souvent sans égard pour la qualité ou l’éthique. Cette frénésie nous transforme en voyeurs sadiques, mentalement atteints. TikTok, en particulier, exacerbe cette tendance.

Il est crucial de développer une véritable « philosophie du selfie » pour comprendre ce comportement compulsif à vouloir « immortaliser » chaque scène insolite ou dramatique dont nous sommes témoins. Ce besoin de capturer l’instant, souvent au détriment de la sécurité et de l’aide aux victimes, soulève des questions profondes sur notre humanité. Quelle mouche nous a donc piqués ?

Dans le monde des autoportraits, dit-on, l’important c’est l’arrière-plan. Ce dernier n’est pas toujours joyeux, souvent il est très grave, voire pathétique. Cette quête incessante de validation à travers les réseaux sociaux nous éloigne de notre humanité, transformant des situations tragiques en simples arrière-plans pour notre propre gloire.

Le phénomène du « selfitis » au Sénégal nécessite une prise de conscience collective. Nous devons réévaluer nos priorités et redécouvrir l’importance de l’empathie et de l’action désintéressée. Immortaliser des moments est une chose, mais préserver notre humanité en est une autre, bien plus précieuse.

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