Partenariat énergétique Sénégal-Congo : Ousmane Sonko rassure après la suspension du contrat avec Socelec

La coopération énergétique entre le Sénégal et la République du Congo demeure sur de bons rails malgré la suspension du contrat récemment signé avec Socelec. C’est le message de fermeté et d’optimisme qu’a tenu à livrer le Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, lors d’un point de presse conjoint avec son homologue congolais, Anatole Collinet Makosso, tenu ce jeudi.

Le chef du gouvernement sénégalais s’est voulu rassurant sur l’avenir de ce partenariat stratégique, insistant sur la nature souveraine des décisions prises par le Congo concernant son secteur énergétique. « Sur la question de l’énergie, je considère que le Congo est un pays souverain qui a éprouvé le besoin à un moment donné d’aller vers une forme d’organisation de son secteur énergétique », a affirmé Ousmane Sonko.

Le contrat en question, signé en février dernier, liait la Socelec – filiale de la Senelec – à l’État congolais dans le cadre d’une convention d’affermage portant sur la distribution et la commercialisation de l’électricité à Brazzaville. Toutefois, en raison de certaines préoccupations internes, les autorités congolaises ont décidé de suspendre la mise en œuvre du contrat, provoquant un certain nombre d’interrogations dans les milieux économiques et diplomatiques.

Face à cela, Ousmane Sonko a tenu à clarifier la position du Sénégal. « Il n’a pas été question ici d’annulation du marché. Il y a des préoccupations intérieures qui ont amené le gouvernement congolais à considérer qu’il fallait suspendre le temps de procéder à un certain nombre de réglages », a-t-il expliqué. Il s’est dit convaincu que le partenariat reprendra sous de meilleurs auspices, insistant sur la nécessité de renforcer les échanges économiques entre pays africains. « Je demeure convaincu que ce contrat sera parfait, que ce contrat sera validé, et que ce sera un bel exemple de ce que nous pouvons faire dans cette dynamique de coopération sud-sud, de coopération entre pays africains », a-t-il déclaré.

Le Premier ministre a également critiqué la dépendance excessive à des partenaires extérieurs, tout en précisant que le recours à des entreprises étrangères n’est pas à exclure. « Souvent, nous avons à rougir de faire venir des entreprises qui viennent de très loin, ce qui n’est pas mauvais. Nous ne sommes pas hermétiques », a-t-il nuancé, soulignant l’importance de valoriser les expertises africaines dans les projets structurants.

Pour sa part, Anatole Collinet Makosso a expliqué que la suspension du contrat d’affermage s’inscrit dans une logique de rigueur administrative et de préparation de l’opinion publique. « La convention d’affermage a été suspendue. Oui, c’est le Premier ministre qui a pris la note. Suspendons la mise en œuvre du contrat d’affermage, le temps que nous puissions mettre au point les 48 mesures préalables qui ont été identifiées et que nous préparions l’opinion sur la nécessité de la réforme », a-t-il indiqué.

Ce report ne signifie donc pas une rupture mais une phase de transition, destinée à garantir une mise en œuvre optimale du contrat dans un environnement institutionnel mieux préparé. Les deux chefs de gouvernement ont affiché leur volonté commune de maintenir une coopération étroite, fondée sur la confiance, le respect mutuel et la vision partagée d’un développement endogène du continent.

Affaire Socelec – Senelec : Le Premier ministre congolais confirme devant Ousmane Sonko la suspension du contrat d’affermage de l’électricité

Le partenariat énergétique entre le Sénégal et la République du Congo vient de subir un coup d’arrêt significatif. En visite officielle à Dakar depuis le 10 juin 2025, Anatole Collinet Makosso, Premier ministre du Congo-Brazzaville, a confirmé, devant son homologue sénégalais Ousmane Sonko, la suspension du contrat d’affermage signé entre l’État congolais et la Socelec, filiale de la Société nationale d’électricité du Sénégal (Senelec).

Ce contrat d’affermage, signé le 13 février 2025, portait sur la distribution et la commercialisation de l’électricité au Congo-Brazzaville pour une période de dix ans. Il avait été conclu entre Émile Ouosso, ministre congolais de l’Énergie et de l’Hydraulique, et Pape Mamadou Diop, directeur général de la Socelec. L’accord visait à structurer la gestion du secteur de l’électricité en s’appuyant sur l’expertise sénégalaise, dans un pays où les coupures d’électricité et les pertes techniques sont fréquentes.

Cependant, malgré la signature officielle, l’exécution du contrat n’a jamais réellement démarré. Lors de sa déclaration à Dakar, Anatole Collinet Makosso a expliqué que cette suspension répondait à un ensemble de pressions internes et à une absence de consensus autour du projet. « Nous avons confondu vitesse et précipitation », a-t-il admis, précisant que des voix discordantes s’étaient élevées dès les premiers instants du processus, notamment au sein des syndicats congolais, des partenaires sociaux, et dans les médias locaux.

Le Premier ministre congolais a révélé que le contrat, bien que signé, comportait plusieurs zones d’ombre et points non élucidés, qui ont alimenté les critiques. Il a indiqué que des inquiétudes sérieuses ont été soulevées sur le plan juridique, administratif et stratégique, obligeant les autorités à marquer une pause. « Ce n’est pas une remise en cause du partenariat sénégalais, mais une volonté de revoir certaines clauses fondamentales », a-t-il précisé.

Plusieurs griefs ont été formulés contre la Socelec, au cœur de cette controverse. D’abord, la société aurait commencé à mener des activités préliminaires sur le terrain avant même la finalisation complète de sa procédure de légalisation au Congo. Une démarche jugée hâtive par les autorités locales. Ensuite, les syndicats congolais ont exprimé leur désapprobation face à la composition du Conseil d’administration de la société : hormis un seul administrateur congolais, tous les autres membres sont sénégalais, y compris le président du Conseil d’administration et le directeur général. Une gouvernance perçue comme déséquilibrée, voire arrogante.

Autre point de crispation : l’absence de capital de démarrage réel pour les opérations. Des voix internes dénoncent le fait que la société serait sous-capitalisée alors que ses dirigeants sénégalais mèneraient un train de vie qualifié de « princier ». Cela jette le doute sur la capacité réelle de la Socelec à prendre en charge un service public aussi stratégique que celui de l’électricité.

Anatole Collinet Makosso a par ailleurs rappelé l’importance de la concertation préalable et de la sensibilisation des populations et des parties prenantes, soulignant qu’un « travail pédagogique insuffisant » a contribué à nourrir la méfiance générale. Cette situation rappelle, selon ses propres termes, « l’épisode de l’affaire Hydro-Québec », qui avait provoqué un tollé au sein de la société congolaise pour des raisons similaires.

Face à la complexité du dossier, le Premier ministre congolais a appelé à une renégociation des modalités d’opérationnalisation du contrat, en évoquant l’existence de 41 mesures préalables qui n’ont pas encore été exécutées ou validées. Il s’est montré ouvert à une poursuite du dialogue avec les autorités sénégalaises pour assainir les bases du partenariat et garantir une relance future, plus inclusive et transparente.

Pour le gouvernement sénégalais, et notamment pour la Senelec, cette suspension représente un revers dans sa stratégie d’expansion régionale, mais aussi un signal d’alerte sur la nécessité de mieux calibrer les projets de coopération à l’international. La filiale Socelec, conçue pour incarner le savoir-faire sénégalais dans le domaine de l’énergie, se retrouve aujourd’hui au cœur d’un débat sur la souveraineté économique et la transparence contractuelle dans les pays africains.

Au-delà des considérations techniques, cette affaire soulève des questions fondamentales sur la manière dont les États africains doivent bâtir des partenariats économiques solides, équilibrés et socialement acceptés. Si le contrat venait à être réactivé à l’issue des discussions à venir, il devra cette fois intégrer des mécanismes de gouvernance partagée, une communication plus claire et des engagements financiers précis, au risque de voir le projet sombrer définitivement dans l’impasse.

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