Présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire : la RADDHO alerte sur l’exclusion de Tidjane Thiam et appelle au dialogue

À l’approche de l’élection présidentielle prévue en octobre 2025 en Côte d’Ivoire, les tensions politiques prennent une tournure préoccupante. Dans un communiqué publié récemment, la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) a exprimé de vives inquiétudes face à la situation préélectorale, marquée notamment par l’exclusion controversée de Tidjane Thiam de la liste électorale.

Candidat du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et principal opposant au pouvoir en place, Tidjane Thiam est au centre d’un bras de fer politico-juridique. Une décision judiciaire rendue le 22 avril 2025 a invalidé son inscription sur la liste électorale, provoquant une onde de choc au sein de l’opposition et des organisations de défense des droits humains.

Selon la RADDHO, cette décision constitue un « précédent dangereux », d’autant plus qu’elle est intervenue après la perte de la nationalité française par Tidjane Thiam en mars 2025. L’organisation craint que cette situation ne fasse de lui un apatride, un statut qui, selon elle, soulève de graves préoccupations au regard des normes internationales.

Le président de l’Observatoire Ivoirien des Droits de l’Homme (OIDH) a pour sa part estimé que cette exclusion ouvre un contentieux juridique complexe, mettant en question la nationalité ivoirienne de Thiam. Il a aussi rappelé que, conformément à l’article 12 du Code électoral ivoirien, les décisions juridictionnelles en matière d’inscription sur la liste électorale sont définitives et sans appel.

Face à ces évolutions, la RADDHO a exprimé :

Sa vive inquiétude quant à une atmosphère politique tendue, susceptible de compromettre la transparence et la paix autour du scrutin ; Son regret face à ce qu’elle considère comme une instrumentalisation de la justice à des fins politiques ; Un appel au dialogue entre tous les acteurs politiques et sociaux afin de parvenir à un consensus sur la participation des candidats de l’opposition, dans l’intérêt de la stabilité et de la démocratie ; Une exhortation au “génie ivoirien”, à l’ouverture et à l’hospitalité du peuple pour prévenir toute forme de division, de discrimination ou d’exclusion.

La RADDHO a également rappelé les engagements pris par la Côte d’Ivoire lors de la 37e session ordinaire de la Conférence de l’Union Africaine, notamment en faveur du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif au droit à une nationalité et à l’éradication de l’apatridie, adopté en février 2024.

Enfin, l’organisation invite les autorités ivoiriennes à garantir une compétition électorale ouverte, respectueuse des principes démocratiques, permettant à tous les citoyens d’exprimer librement leur suffrage. Elle appelle également la CEDEAO et l’Union Africaine à intervenir en médiateurs pour éviter une crise politique majeure dans un pays encore marqué par les séquelles des conflits passés.

Présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire : La double nationalité de Tidjane Thiam, un obstacle juridique à ses ambitions ?

À huit mois de la présidentielle ivoirienne, l’avenir politique de Tidjane Thiam demeure suspendu à une question de droit : sa double nationalité. Le président du PDCI-RDA, perçu par beaucoup comme une figure de renouveau, pourrait bien voir ses ambitions présidentielles contrariées par des contraintes légales liées à sa nationalité française.

Tidjane Thiam a officiellement annoncé début février avoir entamé une procédure pour renoncer à sa nationalité française, condition sine qua non pour briguer la magistrature suprême en Côte d’Ivoire. La Constitution exige en effet que tout candidat à la présidentielle soit exclusivement ivoirien. Mais à quelques mois de la convention du PDCI, au cours de laquelle sera désigné le candidat du parti, l’incertitude demeure : la procédure de renonciation sera-t-elle finalisée à temps ?

Pendant ce temps, son principal challenger au sein du parti, Jean-Louis Billon, semble avoir pris une longueur d’avance. Il a déjà obtenu, le 7 mars dernier, un décret officialisant sa perte de nationalité française.

Même si Tidjane Thiam parvient à abandonner sa nationalité française avant la convention et à s’imposer comme candidat du PDCI, un autre obstacle juridique pourrait se dresser devant lui : l’article 48 du Code de la nationalité ivoirienne. Ce texte stipule qu’un Ivoirien majeur perd automatiquement sa nationalité ivoirienne s’il acquiert volontairement une nationalité étrangère.

C’est justement ce point qui alimente la polémique. Pour Thiam, cette disposition ne devrait pas prévaloir sur les principes constitutionnels. Lors d’une rencontre avec les militants du PDCI de Zanzan, il a fustigé cet article qu’il qualifie de « sombre » :

« La Constitution est au-dessus de la loi. […] Ne laissez pas les gens qui ne respectent pas la Constitution vous complexer avec un article 48 sombre que personne ne connaît. »

La réplique du pouvoir : « Sombre article 48, est-ce que c’est nous ? »

Les propos de Tidjane Thiam n’ont pas tardé à susciter la réplique du camp présidentiel. Le porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, l’a accusé de ternir l’héritage du président Félix Houphouët-Boigny, sous le mandat duquel l’article 48 a été adopté.

« Pourquoi veut-il insulter la mémoire du président Félix Houphouët-Boigny ? […] Quand il parle, il parle avec tellement de conviction qu’on a l’impression que tout ce qu’il dit est vrai. »

Pour tenter d’éteindre la polémique, l’avocat de Tidjane Thiam, Me Blessy Jean Chrysostome, a affirmé que son client était français par filiation, et non par naturalisation. Une nuance cruciale, car l’article 48 concerne l’acquisition volontaire d’une nationalité étrangère.

Mais cette version est contredite par le site Afrik Soir, qui affirme détenir la preuve d’une naturalisation en bonne et due forme. Le média cite un décret de naturalisation du 24 février 1987, publié au Journal Officiel français le 1er mars de la même année, dans lequel figurerait le nom de Tidjane Thiam.

Si cette information se confirme, elle pourrait considérablement fragiliser sa légitimité juridique à se porter candidat en 2025.

Le flou persistant autour du statut juridique de Tidjane Thiam risque de peser lourd dans les prochaines semaines, tant au sein du PDCI que sur la scène politique nationale. Entre interprétations juridiques, batailles médiatiques et considérations stratégiques, c’est tout l’avenir de la candidature de Thiam qui se joue.

Quitter la version mobile