États-Unis: la Chambre des représentants adopte un texte qui menace TikTok d’interdiction

TikTok est dans le viseur des législateurs américains. La Chambre des représentants a voté ce mercredi 13 mars une loi qui pourrait hypothéquer l’avenir du réseau social chinois aux États-Unis, voire carrément mener à son interdiction. Et une fois n’est pas coutume, le texte est adopté à une très forte majorité.

La Chambre des représentants a comptabilisé 352 voix pour et 65 contre. Il n’est pas fréquent, surtout dans une Chambre des représentants fortement fracturée, de voir des textes passer aussi largement et de manière aussi bipartisane.

Les représentants ont signalé depuis des mois leur méfiance vis-à-vis de TikTok et de ses propriétaires chinois. Ils ont par exemple convoqué le patron devant des commissions parlementaires pour lui faire part de leurs fortes inquiétudes quant à l’effet de sa plateforme sur la santé mentale de ses 170 millions d’utilisateurs américains ou encore sur l’utilisation de leurs données personnelles et sur les risques pour la sécurité nationale. C’est de cela qu’il est question dans ce texte.

Une revente des parts à une société américaine ou une interdiction sur tout le territoire

Et TikTok aurait un choix limité : l’actionnaire chinois ByteDance devrait revendre ses parts à une société américaine ou TikTok serait tout simplement interdit sur le territoire américain. Le républicain du Wisconsin, Mike Gallagher, est l’un des auteurs du texte : « TikTok est une menace pour notre sécurité nationale parce qu’il appartient à ByteDance, qui est au service du Parti communiste chinois. Nous le savons parce que la direction de ByteDance le dit et parce que c’est la loi chinoise. Donc cette loi force TikTok à rompre avec le Parti communiste chinois. »

Pour en arriver là, il faudrait que le président signe la loi. Mais encore faut-il qu’elle arrive jusque sur son bureau et ce n’est pas fait, car maintenant que le texte a été adopté par la Chambre, il faut qu’il le soit aussi au Sénat et ce n’est pas évident.

Certains sénateurs – notamment côté républicain – s’inquiètent en effet d’une interdiction pour des raisons de respect de la liberté d’expression, garantie par le premier amendement de la Constitution. Une vision que le représentant républicain du Texas, Dan Crenshaw, ne partage pas : « Le premier amendement ne donne pas au Parti communiste chinois le droit de posséder les données américaines ou le droit de manipuler les esprits des américains. Ce serait vraiment une interprétation étrange du premier amendement. »

Joe Biden, qui possède pourtant un compte TikTok, s’est dit prêt à signer la loi si elle passe l’étape du Sénat et arrive sur son bureau. Son adversaire Donald Trump, qui avait en son temps essayé d’interdire TikTok, n’en est plus si sûr. D’ailleurs, plusieurs de ses fidèles à la chambre ont voté contre.

ByteDance, la maison-mère de TikTok

Né il y a douze ans à Pékin, le géant chinois de l’internet ByteDance est devenue l’une des entreprises les plus valorisées au monde, à 225 milliards de dollars, selon la société d’intelligence économique CP Insights, devant l’entreprise spatiale d’Elon Musk SpaceX et d’OpenAI, le créateur de ChatGPT. Elle est surtout connue pour avoir créé l’application TikTok, lancée en 2017 et qui rassemble aujourd’hui plus d’un milliard d’utilisateurs. TikTok est la version internationale de l’application Douyin, lancée en 2016 et destinée elle au seul marché chinois.

Depuis sa création, ByteDance a diversifié son activité et s’est lancée dans le commerce en ligne, la réservation de voyage. Le groupe a également créé une application pour éditer des vidéos. À travers le monde, il compte plus de 150 000 employés dans plus de 120 villes. Ses ventes ont dépassé les 110 milliards de dollars en 2023, a rapporté Bloomberg en décembre. N’étant pas coté en Bourse, ByteDance n’est pas tenu de publier ses résultats, mais les médias estiment que son chiffre d’affaires tutoie ceux des plus grandes entreprises du monde.

TikTok a déclaré que 60% de ByteDance étaient détenus par des investisseurs institutionnels, dont le gestionnaire américain d’actifs BlackRock. Les fondateurs de ByteDance possèdent 20% des parts, le reste étant détenu par les employés du groupe, selon TikTok.

Le Maroc hausse le ton face à l’utilisation «destructrice» et «néfaste» de TikTok

Le Maroc va-t-il interdire Tik Tok ? Le sujet fait débat dans le pays. Députés, journalistes et artistes demandent à restreindre la plateforme chinoise, voire à l’interdire sur le sol marocain. Avec plusieurs millions d’utilisateurs, le réseau social est l’un des plus populaires du pays et son utilisation est jugée « destructrice » et « néfaste » surtout pour les plus jeunes. Alors le Maroc va-t-il limiter l’accès des mineurs à ces contenus ou interdire l’utilisation de la plateforme ?

Valeurs contraires à celles du royaume chérifien, infractions récurrentes à la loi… les arguments de plusieurs députés marocains contre la plateforme chinoise sont nombreux. Selon eux, et notamment la députée de la majorité, Hanane Atraguine, les dérives qu’offre l’application TikTok exposent particulièrement les mineurs à des phénomènes comme la mendicité, des activités criminelles ou encore le harcèlement.

Il y a quelques mois, le cas d’un homme adulte, suivi par 135 000 personnes, réclamant des photos à une jeune fille de 12 ans, via la plateforme, avait alerté des militantes des droits des femmes et lancé la polémique. Cette affaire a mis en lumière le manque de lois relatives à la cybercriminalité dans le pays et c’est ce vide juridique que les députés veulent aujourd’hui combler.

Si certains proposent l’interdiction pure et simple de l’application sur le sol du royaume – rejoignant ainsi l’Inde, le Pakistan ou la Jordanie qui ont pris cette décision ces dernières années – d’autres préconisent une régulation plus stricte de TikTok, par exemple en restreignant l’accès aux mineurs ou en encadrant les pratiques commerciales qui se déroulent sur l’application.

Une réglementation commune

La plateforme chinoise revendique 1 milliard d’utilisateurs actifs chaque mois dans le monde et a fait du marché africain une priorité. Mais la multinationale fait face à l’inquiétude de nombreux États qui s’inquiètent de la diffusion à grande échelle des infos, qui estiment que certains contenus ne respectent pas les traditions ou encore les religions. Joint par RFI, Abdelkerim Yacoub Koundougoumi, directeur Afrique de l’organisation Internet sans frontières, estime que c’est aux États du continent africain de s’unir pour mettre en place des règles, des normes et de contraindre ainsi les dirigeants des réseaux sociaux.

RFI

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