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Cameroun: déjà les grandes manœuvres politiques avant les élections de 2025

Le calendrier électoral n’est pas encore clair au Cameroun, à propos des élections municipales, législatives et présidentielle. En théorie, elles sont prévues pour 2025. Mais les états-majors de certains partis politiques sont déjà fortement mobilisés.

« Le parti a décidé de prendre le taureau par les cornes et de se préparer convenablement et sérieusement aux défis qui pointent à l’horizon. » S’exprimant le 21 octobre 2023, à Ebolowa dans le sud du pays, Jean Nkuete, secrétaire général du comité central, ne pouvait être plus clair sur les enjeux des « tournées régionales » qu’il a conduites à travers le pays, à la tête d’une forte délégation de hiérarques du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir).

Tout au long de ce périple politique, M. Nkuete a attiré l’attention de ses camarades sur le fait qu’« un important chapitre de l’histoire de notre démocratie va s’écrire en 2025 lors du triple scrutin municipal, législatif et présidentiel ». D’où l’exhortation adressée aux responsables, appelés à s’ « assurer de l’inscription sur les listes électorales de toutes les électrices et tous les électeurs, militantes, militants, sympathisants, amis et soutiens du RDPC et du président de la République, son excellence Paul Biya ».

Même si la scène politique camerounaise n’est pas coutumière de pareille effervescence hors des périodes électorales proprement dites, cette démarche du RDPC n’est pas surprenante aux yeux des spécialistes. « L’une des forces du RDPC est d’être attentif au positionnement de ses membres et sympathisants et de s’assurer leur fidélité. Il s’agit de lancer et de roder la machine », explique le professeur Mathias Eric Owona Nguini, socio-politologue à l’Université de Yaoundé II-Soa.

À en croire le professeur Michel Oyane, politologue au sein de la même institution universitaire, « le RDPC, qui est un parti d’État, et non un parti-État, définit ainsi, à travers l’action du secrétaire général du comité central, des technologies démocratiques de mobilisation et de remobilisation afin de demeurer à la tête de l’État du Cameroun. »

Fait notable : ces « tournées » de M. Nkuete se sont déroulées dans un contexte marqué par l’intensification des « appels » des militants du RDPC, en direction de Paul Biya, 92 ans en 2025, afin qu’il se présente à la prochaine élection présidentielle. Une vieille pratique. « Les appels relèvent de la routine. On assiste à une hiérarchisation des divers scrutins, le principal étant l’élection présidentielle. Ce qui ne veut dire pas que les autres scrutins, les législatives et les municipales, ne sont pas importants, au contraire », analyse Owona Nguini, qui ajoute : « À partir du moment où le parti dominant se met en branle, les autres formations politiques considèrent qu’il s’agit d’un signal, et se mettent aussi en branle. »

Reconfigurations dans l’opposition

On est loin du calme plat aussi dans les rangs des forces d’opposition. Depuis l’élection, au mois d’octobre, de Joshua Osih, ex-candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2018, au poste de président du Social Democratic Front (SDF, longtemps principal parti d’opposition), cette formation politique fait face à des défections. Signe parmi d’autres : la démission, annoncée le 7 décembre, de Godden Zama, candidat recalé à l’élection au poste de président national, et qui avait sévèrement critiqué le processus électoral. Avant lui, des militants, en nombre, issus de diverses structures de base établies dans plusieurs régions du pays, et des conseillers municipaux, ont rendu leur tablier.

Fait significatif : ils annoncent, en général, leur adhésion au Front pour le changement du Cameroun (FCC), de Jean-Michel Nintcheu, député et ancien vice-président du SDF, qui affiche son soutien à Maurice Kamto, président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC). « Dans les jours qui suivent, je vais aller à la rencontre des femmes et hommes politiques, des personnalités de la société civile pro démocratie, des universitaires, des intellectuels, des femmes et des hommes de culture des dix régions du pays, et de la diaspora pour leur expliquer que c’est un devoir citoyen, un impératif politique et démocratique de soutenir la candidature du président national du MRC, lors de la prochaine présidentielle », annonçait M. Ninctcheu, dans un « appel à la mutualisation des forces du peuple du changement lors des prochaines élections », rendu public le 8 décembre, veille du début du Congrès du MRC.

Déjà, des observateurs s’interrogent sur les incidences politiques, et singulièrement électorales, de ce nomadisme militant sur le SDF. «  Dans certaines régions, on peut prévoir des effets. Il reste à savoir si dans le fief principal du SDF, tout le monde va suivre la logique qui consiste à tourner le dos à ce parti », explique Owona Nguini. Une certitude : en 2025, ou avant, les manœuvres déjà en cours gagneront en intensité.


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