
Discret, rigide dans ses principes et attaché à l’indépendance de la justice, Mamadou Badio Camara aura incarné une certaine idée de la justice sénégalaise : une justice impassible, indépendante et fidèle aux valeurs de l’État de droit. Décédé le 9 avril 2025 à Dakar, cet éminent magistrat laisse un héritage marquant, à la fois dans l’histoire de la justice sénégalaise et dans le domaine de la gouvernance institutionnelle. Retour sur un parcours exceptionnel.
Mamadou Badio Camara naît en 1952 à Dakar. Dès son jeune âge, il se dirige vers une carrière dédiée à la justice et à l’État de droit. Après avoir obtenu son diplôme de l’École nationale d’administration et de magistrature (ENAM) en 1977, il fait ses premiers pas dans le monde judiciaire sénégalais en tant que substitut du procureur au parquet de Dakar. Ce début modeste marque le début d’une ascension qui ne cessera de croître au fil des années, notamment grâce à sa rigueur et à son dévouement à la justice.
Son parcours professionnel le mène à occuper plusieurs postes de responsabilité dans différentes villes du pays, de Kaolack à Ziguinchor, où il exerce en tant que procureur puis substitut général à la Cour d’appel de Dakar. Ces années lui permettent de solidifier ses convictions et de construire une réputation de magistrat impartial et déterminé.
C’est en 2008 que Mamadou Badio Camara fait son entrée à la Cour suprême du Sénégal, dans le cadre de la fusion du Conseil d’État et de la Cour de cassation. L’étendue de ses responsabilités et sa rigueur intellectuelle le propulsent rapidement à des positions de plus en plus importantes au sein de la Cour suprême. Secrétaire général, président de chambre, et procureur général, il ne tarde pas à se faire un nom dans le système judiciaire sénégalais.
En 2015, il est élu président de la Cour suprême, fonction qu’il occupera avec une autorité respectée et une gestion très rigoureuse des affaires judiciaires. Sous sa présidence, la Cour suprême est perçue comme un bastion de justice impartiale et un rempart contre toute ingérence politique.
En parallèle à ses fonctions nationales, Mamadou Badio Camara développe une carrière internationale. Il œuvre comme expert pour les Nations unies au Burundi, il est consultant pour l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en Haïti, et siège au Comité des Nations unies contre les disparitions forcées. Il devient également vice-président de l’AHJUCAF, un réseau francophone des hautes juridictions de cassation, qui regroupe des magistrats des plus hautes institutions judiciaires de la francophonie.
C’est en 2022, après une carrière déjà longue et prestigieuse, que Mamadou Badio Camara est nommé président du Conseil constitutionnel du Sénégal, une institution clé pour la sauvegarde de l’ordre constitutionnel et de l’équilibre des pouvoirs. Son nom restera gravé dans l’histoire en 2024, lors de l’une des périodes les plus tumultueuses du pays.
À une époque où l’Assemblée nationale et le président Macky Sall cherchaient à reporter la date de la présidentielle pour prolonger le mandat du président en place, Mamadou Badio Camara fait preuve d’une indépendance de jugement implacable. Le 15 février 2024, il rend une décision historique en invalidant la loi du Parlement et le décret présidentiel qui cherchaient à reporter l’élection. Cette décision marque un tournant : la Constitution doit primer sur les intérêts politiques personnels. Camara insiste sur l’obligation constitutionnelle de tenir l’élection présidentielle avant le 2 avril 2024.
Sa décision, ferme et justifiée, permet d’éviter une crise constitutionnelle et politique majeure, en rétablissant l’ordre juridique du pays. La présidentielle se tient donc comme prévu le 24 mars 2024. Ce scrutin voit l’élection de Bassirou Diomaye Faye, avec 54 % des voix, au premier tour.
Lors de la cérémonie d’investiture, Mamadou Badio Camara se montre particulièrement solennel dans ses propos. Il souligne avec gravité : « Le secret est dans le bulletin de vote, dans la conviction des citoyens que leur voix peut changer leur destin, sous le contrôle d’une justice impartiale ». Ces mots résonnent comme un appel à la défense de la démocratie et de l’État de droit, un dernier message fort, rappelant que la justice ne doit jamais se plier aux pressions politiques.
Mamadou Badio Camara laisse derrière lui un héritage profond et indélébile dans l’histoire de la justice sénégalaise. Il incarne cette voix de la vérité qui s’est toujours élevée pour défendre les principes sacrés de la Constitution, de l’État de droit, et de l’indépendance judiciaire, même au prix de grandes tensions politiques. Son départ laisse un vide immense dans le système judiciaire sénégalais, mais aussi une leçon de rigueur et de dévotion au service public.
La justice, pour Mamadou Badio Camara, n’était pas seulement une fonction : c’était une mission sacrée. Il restera dans les mémoires comme un pionnier du respect des principes constitutionnels et un gardien du droit sénégalais.
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