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Mimi Touré et les Pionnières Oubliées : Un Manque de Respect pour l’Histoire des Femmes Politiques

Lors d’une récente émission, l’ancienne Premier ministre Mimi Touré a émis des propos controversés, dénigrant les femmes politiques sénégalaises des générations précédentes en qualifiant la plupart d’entre elles d’« illettrées » “Khakharkates” et en réduisant leur rôle à celui de simples figures folkloriques. Ces paroles, choquantes de la part d’une femme qui devrait au contraire prendre exemple sur ces pionnières, sont non seulement décevantes mais aussi incompréhensibles. En tant que personnalité politique de premier plan, Mimi Touré aurait dû reconnaître l’héritage de ces femmes d’exception, au lieu de les réduire à des stéréotypes injustifiés et stéréotype.Cette attitude révèle une méconnaissance flagrante de l’histoire des femmes leaders qui ont pavé la voie pour l’engagement politique des femmes au Sénégal.

Il est important de rappeler à Mimi Touré que Soukeyna Konaré est une figure emblématique de l’histoire politique du Sénégal. Elle a joué un rôle crucial dans la mobilisation de l’électorat féminin à une époque où l’élite africaine réclamait de prendre le pouvoir, écartant ainsi les métis et les Européens. Son engagement, aux côtés d’autres pionnières telles qu’Adja Ndoumbé Ndiaye, Arame Tchoumbé Samb, Rose Basse, Jeanne Martin Cissé, et Aïda Sarr, a permis de poser les premières pierres du militantisme féminin au Sénégal. Ces femmes, regroupées au sein de l’Union des Femmes du Sénégal (U.F.S), ont été les premières à célébrer la Journée internationale de la femme le 8 mars 1954, marquant ainsi un tournant dans la reconnaissance des droits des femmes.

Ces premières générations de femmes formées à l’École normale des jeunes filles ont joué un rôle déterminant dans la création des premières associations féminines au Sénégal. Elles se sont consacrées à des activités sociales telles que l’enseignement de la couture, des causeries sur l’hygiène, et l’alphabétisation, contribuant ainsi à l’émancipation des femmes et à leur intégration active dans la société.

Des figures emblématiques comme Caroline Faye, Mantoulaye Guène, Lena Fall Diagne, et Seynabou Cissé, pour n’en citer que quelques-unes, ont marqué l’histoire par leur intelligence, leur courage, et leur engagement. Anciennes pensionnaires du prestigieux Lycée Ahmet Fall et de l’École normale des jeunes filles de Saint-Louis, elles étaient toutes majors de leur promotion, incarnant l’excellence académique et la détermination à transformer la société. Contrairement à l’image réductrice projetée par Mimi Touré, ces femmes n’étaient pas seulement des pionnières en politique, mais aussi des éducatrices de renom qui ont inspiré et formé des générations de jeunes filles à devenir des leaders confiantes et compétentes.

Caroline Faye, première femme députée du Sénégal, fut une figure clé dans la lutte pour les droits des femmes, tout en étant une intellectuelle respectée.

Fatoumata Ka, connue sous le nom de Madame Kâ Fatoumata, fut une pionnière en devenant la première femme Maire d’une ville au Sénégal. Sa carrière a marqué une étape significative dans la promotion de la représentation féminine dans le domaine juridique et administratif. En assumant ce rôle, elle a non seulement ouvert la voie pour d’autres femmes dans des professions dominées par les hommes, mais elle a également contribué à la reconnaissance et à l’égal accès aux opportunités professionnelles pour les femmes sénégalaises. Son engagement et son travail ont laissé un impact durable sur la société, soulignant l’importance de l’inclusion et de l’égalité des genres dans les institutions publiques. Autre figure, à savoir, la lionne,
Fambaye fall diop l’une des premières femmes syndicalistes à occuper un poste de ministre déléguée pour les immigrés auprès du ministère des affaires étrangères et des sénégalais de l’extérieur.
Mantoulaye Guène, par son engagement social et politique, a également contribué à l’éducation des femmes et à leur émancipation, tout en restant une source d’inspiration pour de nombreuses jeunes femmes. Sortie du prestigieux Lycée Ahmet Fall, major de sa promotion à l’École normale William Ponty de Rufisque, elle était une patriote dévouée et une socialiste engagée dont la passion pour le Sénégal et la justice sociale était inégalée. Son combat politique, notamment ses échanges mémorables à l’Assemblée nationale, témoigne de son courage et de sa détermination. Mantoulaye Guène reste une figure rare, dont l’engagement et la force de caractère continuent d’inspirer, à une époque où de tels leaders se font rares.

Ces femmes n’ont pas choisi de poursuivre des études supérieures en Europe,refusant des bourses d’etudes dans les plus grandes universités de France, préférant rester au Sénégal pour devenir enseignantes et infirmières, dédiant leur vie à l’éducation des femmes et à l’entretien de leurs familles tout en élevant des enfants qui deviendraient de brillants intellectuels. Je prends en témoin la brillante Dr. Aïda Mbodj qui a été comme une fille pour ces femmes.
Ces femmes étaient reconnue par les plus grands politiciens comme le président Senghor ,le Président Abdou Diouf et Madieyna Diouf, avec qui elles ont partagé les mêmes écoles.

Oh non elles n’étaient pas recrutées comme des « khakharkates » ; au contraire, elles se retrouvaient sur le terrain politique aux côtés des hommes. La vulgarité politique et le concept de « khakharkates » sont des phénomènes modernes qui n’existaient pas à leur époque.

Lena Fall Diagne, Arame Diène, et Seynabou Cissé, parmi tant d’autres, ont aussi su brillamment allier leurs carrières professionnelles à leur militantisme, ouvrant ainsi la voie à une nouvelle génération de femmes leaders.

Réduire ces femmes à de simples figures « folkloriques » “Khakharkates” est non seulement une insulte à leur héritage, mais aussi une révision déplorable de l’histoire. Ces pionnières ont fait face aux défis de leur époque dans un contexte bien plus difficile que celui d’aujourd’hui, luttant pour les droits des femmes et leur place dans la société sénégalaise.

Il est crucial de rappeler à Mme Touré, ainsi qu’à tous ceux qui pourraient sous-estimer l’impact de ces pionnières, que l’histoire des femmes politiques au Sénégal est riche et complexe, marquée par des contributions profondes et durables. Plutôt que de les dénigrer, il serait plus judicieux de les honorer et de reconnaître que les droits et libertés dont jouissent les femmes politiques aujourd’hui sont en grande partie le fruit des luttes menées par ces femmes d’exception.

Mimi, il est essentiel de reconnaître que malgré tes réalisations et ton parcours, tu n’as pas surpassé l’œuvre colossale accomplie par ces femmes pionnières dans le combat pour les droits des femmes. Leur engagement s’est manifesté à une époque où les défis étaient beaucoup plus grands et les ressources beaucoup plus limitées. Elles ont lutté avec une ferveur et une détermination qui ont véritablement changé le cours de l’histoire pour les femmes au Sénégal.

Ces femmes ont réussi à créer un mouvement puissant, à mobiliser des foules, et à inspirer une génération entière, même dans des conditions extrêmement adverses. Leur capacité à galvaniser les masses, à fédérer les énergies autour de la cause féminine, et à faire avancer les droits des femmes dans un contexte social et politique complexe est inégalée.

Aujourd’hui, tu te tiens sur les épaules de ces géantes, mais force est de constater que tu n’as pas encore démontré la même capacité à rallier autant de monde derrière toi avec la même intensité et la même force qu’elles. Leur héritage est une source d’inspiration vivante qui continue de nourrir l’engagement de nombreuses femmes, et leur influence se fait toujours sentir dans le combat pour l’égalité et les droits des femmes.

Rapelles toi que l’histoire de ces femmes est riche et complexe, et que leur contribution au progrès social et politique des femmes mérite un respect et une reconnaissance continus. Ce sont elles qui ont pavé la voie, et leur capacité à galvaniser des foules pour la cause des femmes demeure inégalée.

En somme, le respect dû à ces figures historiques doit transcender les divisions politiques actuelles. Il est essentiel de reconnaître leur apport et de s’inspirer de leur exemple pour continuer à faire avancer la cause des femmes au Sénégal. Mimi Touré, en tant que figure publique influente, a le devoir de mesurer ses paroles et de rendre hommage à celles qui ont ouvert la voie.

Ces femmes ont non seulement contribué à l’évolution du rôle des femmes dans la société sénégalaise, mais elles ont également ouvert la voie pour les générations futures. Leurs efforts ont permis de donner une voix aux femmes dans un contexte où elles étaient souvent marginalisées, et leur héritage reste une source d’inspiration pour les femmes leaders d’aujourd’hui. Leur histoire mérite d’être racontée et honorée pour rappeler à tous l’importance de leur contribution à la construction du Sénégal moderne.

Madame Lissoune Ndiaye Dieng


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