Economie
Moody’s abaisse la note du Sénégal à B3 avec perspective négative : un signal d’alarme pour l’économie nationale
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par
Le Dakarois
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Moody’s a récemment déclassé les notations du Sénégal, abaissant la note de l’émetteur à long terme et des titres de créance non garantis de premier rang en devises étrangères de B1 à B3, avec une perspective négative. Ce déclassement conclut la revue entamée le 4 octobre 2024 et confirme les inquiétudes croissantes sur la situation budgétaire du pays.
La principale justification de ce déclassement réside dans les paramètres budgétaires beaucoup plus faibles que prévu, mis en lumière par la Cour des comptes du Sénégal. Son rapport d’audit a révélé que la dette de l’administration centrale s’élevait à 99,7 % du PIB en 2023, soit environ 25 points de pourcentage de plus que ce qui était initialement annoncé par les autorités. Ce chiffre dépasse également les estimations préliminaires du ministère des Finances, réalisées en septembre 2024. Une telle réévaluation des finances publiques signifie que le Sénégal est bien plus vulnérable aux chocs économiques défavorables que ce qui était précédemment anticipé.
La perspective négative associée à cette notation reflète des risques accrus pour la trajectoire budgétaire et la liquidité du gouvernement. Malgré des efforts pour réduire le déficit budgétaire et restaurer une certaine marge de manœuvre financière, l’ampleur de l’endettement complique sérieusement ces ambitions. Si le Sénégal vise une réduction significative de son déficit, les faiblesses budgétaires identifiées compromettent ces objectifs. Moody’s estime que le pays pourrait recevoir un soutien du Fonds Monétaire International (FMI), mais la limitation des options de financement sur les marchés reste une source d’inquiétude.
En parallèle, les plafonds de pays en monnaie locale et en devises étrangères ont été abaissés, respectivement de Baa3 et Ba1 à Ba2 et Ba3. Ces révisions tiennent compte de l’impact modéré du gouvernement dans l’économie et du soutien apporté par l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). L’adossement du franc CFA à l’euro par la garantie du Trésor français réduit certains risques liés aux déséquilibres extérieurs, mais ne suffit pas à compenser la situation financière fragile du pays.
Le rapport de la Cour des comptes met également en évidence des vulnérabilités accrues en matière de dette et de liquidité. En 2024, le ratio de la dette de l’administration centrale est estimé à 107 % du PIB, en raison d’un déficit budgétaire projeté de 11,6 % pour l’année. Ce niveau d’endettement est largement supérieur à la médiane de 49 % du PIB pour les pays notés B, plaçant le Sénégal parmi les nations les plus endettées de sa catégorie économique. De plus, la dette garantie par l’État a été évaluée à 2,3 billions de francs CFA, soit environ 11 % du PIB, un chiffre quatre fois supérieur à celui initialement déclaré. Cette situation accroit les risques de passif pour le gouvernement.
Le Sénégal devra faire face à des besoins de financement brut considérables, atteignant environ 20 % du PIB en 2025. Une part importante de ces obligations concerne les remboursements d’amortissements, estimés à 2,9 billions de francs CFA, soit 12,8 % du PIB. De surcroît, la dette non déclarée jusqu’en mars 2024, qui s’élève à 2,5 billions de francs CFA (12,3 % du PIB), risque d’alourdir encore davantage le service de la dette dans les années à venir. Ces défis de refinancement imposent au gouvernement de restructurer ses échéances afin de limiter les risques.
Les lacunes en matière de gouvernance identifiées dans le rapport de la Cour des comptes ont également contribué au déclassement de Moody’s. La mauvaise gestion budgétaire sous l’administration précédente a été mise en lumière, avec des dépenses extrabudgétaires non régularisées, une comptabilisation incomplète des prêts financés par des projets, et une dette garantie bien plus élevée que déclarée initialement. Le gouvernement actuel s’est engagé à améliorer la transparence et la gestion des finances publiques à travers des réformes structurelles. Parmi les mesures envisagées figurent un contrôle renforcé des dépenses, une gestion unifiée de la dette publique et une amélioration des rapports financiers. Cependant, la mise en œuvre de ces réformes sera progressive et leur efficacité devra être prouvée sur le long terme.
La perspective négative de la notation souveraine repose également sur l’incertitude entourant le plan de consolidation budgétaire du Sénégal. Bien que l’objectif du gouvernement soit d’atteindre un déficit de 7,1 % du PIB en 2025 et de réduire progressivement ce chiffre à 3 % d’ici 2027, Moody’s estime que cet ajustement sera difficile à réaliser. Le gouvernement devra notamment renforcer ses recettes fiscales et rationaliser ses dépenses pour espérer atteindre ces cibles ambitieuses. Le rythme de consolidation budgétaire pourrait être plus lent que prévu, en raison des risques pesant sur la croissance des recettes publiques et des charges d’intérêts croissantes.
L’accès au financement constitue un autre défi de taille. Le Sénégal cherche à diversifier ses sources de financement en sollicitant des prêts concessionnels, en mobilisant les marchés internationaux et régionaux, et en explorant de nouveaux instruments tels que les obligations de la diaspora. Un nouvel accord avec le FMI, prévu pour juin 2025, pourrait débloquer des fonds concessionnels cruciaux. Toutefois, tout retard dans ces négociations accroîtrait la dépendance du pays vis-à-vis des financements de marché, ce qui pourrait poser des risques supplémentaires si les investisseurs perdent confiance.
En termes d’environnement, de société et de gouvernance (ESG), Moody’s attribue un score négatif au Sénégal. Les risques environnementaux sont élevés, notamment en raison de l’exposition aux conditions climatiques extrêmes et à l’élévation du niveau de la mer. Le pays souffre également d’un accès limité aux services de base, avec seulement 68 % de la population ayant accès à l’électricité et un marché du travail marqué par une forte précarité. Sur le plan de la gouvernance, les faiblesses révélées dans la gestion budgétaire passée ont lourdement pesé sur la notation, malgré les efforts du gouvernement pour améliorer la transparence et renforcer les institutions.
En conclusion, la décision de Moody’s de déclasser la notation souveraine du Sénégal à B3 avec une perspective négative reflète les graves défis économiques et budgétaires auxquels le pays est confronté. L’ampleur de l’endettement, les lacunes en matière de gouvernance et les risques accrus de refinancement compliquent les efforts de stabilisation financière. Le gouvernement devra redoubler d’efforts pour restaurer la confiance des investisseurs, mettre en œuvre des réformes structurelles et assurer un assainissement budgétaire durable afin d’éviter une nouvelle dégradation de sa notation financière.
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