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Niger, Mali et Burkina jugent « irréversible » leur retrait prochain de la Cedeao

Le retrait imminent des trois pays du Sahel – le Mali, le Burkina Faso et le Niger – de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) marque une étape importante dans la réorganisation géopolitique de la région, avec des implications potentielles sur plusieurs fronts économiques, politiques et sociaux. Voici un aperçu plus détaillé des raisons, des conséquences et des implications de cette décision.

Le 13 décembre 2024, les autorités du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont confirmé que leur retrait de la Cedeao est désormais une décision « irréversible ». Cette déclaration intervient à un moment clé, alors qu’un sommet de la Cedeao est prévu pour le 15 décembre à Abuja, la capitale du Nigeria. Les trois pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) avaient exprimé dès janvier 2024 leur intention de quitter l’organisation. Ils estiment que la Cedeao a été largement influencée par l’ancienne puissance coloniale, la France, et qu’elle n’a pas apporté le soutien nécessaire pour faire face aux défis sécuritaires et économiques de la région.

Le départ des trois pays deviendra effectif en janvier 2025, conformément aux statuts de la Cedeao, qui prévoient un délai d’un an après l’annonce d’une telle décision. Cela pourrait marquer la fin de leur participation aux discussions économiques et politiques de cette organisation régionale, créée pour favoriser la coopération et l’intégration entre ses 15 États membres.

Les trois pays font face à des défis communs, notamment des coups d’État militaires qui ont renversé les gouvernements démocratiquement élus. Depuis 2020, le Sahel a connu une série de coups d’État, avec des changements de régime au Mali en 2020 et 2021, au Burkina Faso en 2022 et au Niger en 2023. Ces événements ont été largement motivés par l’inefficacité des gouvernements précédents à lutter contre les groupes jihadistes qui déstabilisent la région.

Les juntes militaires qui dirigent actuellement ces pays ont critiqué la Cedeao pour son approche perçue comme inadaptée face aux réalités sur le terrain. Elles ont également reproché à l’organisation de n’avoir pas su aider les pays du Sahel dans leur lutte contre les groupes terroristes qui mènent des attaques meurtrières dans la région depuis plusieurs années. Selon ces régimes, la Cedeao, souvent perçue comme trop influencée par la France, n’a pas pris de mesures concrètes pour répondre aux besoins spécifiques de sécurité et de développement des pays du Sahel.

La rupture entre les pays du Sahel et la Cedeao s’inscrit dans un contexte plus large de réorientation géopolitique. Depuis leur prise de pouvoir, les régimes militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont entamé un rapprochement avec de nouveaux partenaires internationaux, notamment la Russie. Ces pays cherchent à diversifier leurs relations et à trouver des alliés plus « sincères », selon leurs termes, dans la lutte contre le terrorisme et la recherche de développement économique.

La France, longtemps perçue comme un allié incontournable dans la lutte contre les jihadistes au Sahel, a vu ses relations se détériorer avec ces pays à la suite de l’intervention militaire en 2013, qui a mené à l’opération Serval pour lutter contre les groupes armés au Mali. Les critiques croissantes des politiques françaises dans la région ont poussé les pays du Sahel à chercher de nouvelles alternatives, avec la Russie jouant un rôle de plus en plus prépondérant.

Le retrait des trois pays de la Cedeao aura des répercussions profondes sur les échanges économiques dans la région. La Cedeao, en tant qu’organisation économique régionale, facilite la libre circulation des personnes et des biens entre ses États membres. Le retrait de ces pays pourrait compliquer ces échanges, surtout en matière de transport, de commerce et de coopération monétaire.

Un des éléments clés de cette relation économique est la gestion du franc CFA, la monnaie utilisée par plusieurs pays de la Cedeao et par d’autres pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Bien que les pays de l’AES fassent encore partie de l’Uemoa et utilisent le franc CFA, certains ont évoqué la possibilité de se retirer de cette union monétaire à moyen terme. Cela représenterait un défi majeur pour la zone franc, avec des implications possibles pour la stabilité économique de l’Afrique de l’Ouest.

Malgré la rupture avec la Cedeao, l’AES a entrepris plusieurs actions pour renforcer sa coopération interne. En novembre 2024, les trois pays ont signé un protocole d’accord pour abolir les frais d’itinérance pour les communications téléphoniques entre eux. Cela facilitera la circulation de l’information et des services entre les pays membres.

De plus, les pays de l’AES cherchent à harmoniser leurs documents de voyage et d’identité pour favoriser la libre circulation de leurs citoyens. Ces mesures visent à faciliter les échanges commerciaux et à renforcer les liens internes au sein de la confédération.

La décision irrévocable des pays du Sahel de quitter la Cedeao et de s’éloigner de l’influence de la France marque un tournant dans la dynamique géopolitique de la région. Les implications de cette rupture, tant sur le plan économique que sur celui de la sécurité, se feront sentir dans les années à venir. La question de savoir si les pays de l’AES réussiront à renforcer leur coopération interne tout en gérant leur relation avec de nouveaux partenaires, notamment la Russie, reste ouverte. Ce processus pourrait redéfinir le paysage politique et économique de l’Afrique de l’Ouest.


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