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Justice

Scandale foncier, menaces armées et refus de remboursement : les dessous de l’affaire Alioune Kandji

Alioune Kandji, major de la gendarmerie à la retraite, est au cœur d’un retentissant scandale mêlant affaire foncière, outrages à autorités, menaces armées et soupçons de fraude. Convoqué vendredi dernier par la Sûreté urbaine (SU), il a été placé sous mandat d’arrêt par le juge du premier cabinet de Kaolack et écroué dans l’attente de son audition. Il est désormais poursuivi pour « outrage à magistrat », « outrage à un commandant de la force publique dans l’exercice de ses fonctions » et « diffusion de fausses nouvelles ». Ces nouvelles accusations s’ajoutent à des délits antérieurs : « association de malfaiteurs », « escroquerie », « faux et usage de faux ».

L’affaire, relatée par le quotidien Libération dans son édition du 2 juin 2025, remonte à 2018. À cette époque, un certain Mamadou Moustapha Sarr, agissant au nom d’Alioune Kandji, avait approché un entrepreneur, Mansour Sy, pour lui proposer l’achat de terrains commerciaux à Kaolack. Sarr avait affirmé agir pour le compte de Kandji, qui avait lui-même confirmé l’opération et proposé un prix de 28 millions de francs CFA. Pour lancer la transaction, il avait demandé un acompte de 2 millions, que Sy avait remis directement à Sarr.

Au lieu de recevoir des actes de cession en bonne et due forme, Mansour Sy s’était vu remettre de simples conventions de location signées par Kandji. Lorsque Sy avait exprimé ses inquiétudes, les vendeurs l’avaient rassuré, promettant qu’une autorisation de construire lui serait rapidement délivrée. Pourtant, lorsque Sy avait déposé une demande officielle, le service régional de l’Urbanisme de Kaolack avait rejeté la requête. Il s’était avéré que le site se trouvait sur une zone relevant du domaine public, destinée à un projet d’aménagement baptisé « Boulevard du Cœur de ville ». Or, conformément à l’article 9 de la loi 76-66 du 2 juillet 1976, le domaine public est inaliénable et imprescriptible.

Des enquêtes complémentaires avaient révélé que le titre foncier 1267/KL concerné ne pouvait en aucun cas faire l’objet de cession ou d’autorisation de construire. Face à cette situation, deux autres mis en cause, Moustapha Guèye et Mamadou Moustapha Sarr, avaient choisi de rembourser intégralement les 14 millions de francs CFA encaissés pour les lots vendus. Mais Alioune Kandji, de son côté, avait refusé tout remboursement, arguant qu’il agissait « au nom de l’État » et que c’était à l’acquéreur de se débrouiller pour obtenir les autorisations ou se faire rembourser par l’État.

Cette position, jugée intenable par les autorités judiciaires, avait conduit le procureur de Kaolack de l’époque, Cheikh Dieng, à demander au commissaire central de convoquer Kandji pour l’obliger à restituer les fonds. Convoqué le 28 novembre 2022 pour être entendu deux jours plus tard, Kandji avait refusé de se présenter, déclarant que « s’il est arrêté, c’est l’État du Sénégal qui est arrêté », car il aurait agi pour le compte de l’État.

Pire, lorsqu’une équipe de la Sûreté urbaine de Dakar avait tenté de l’appréhender à son domicile, Kandji s’était barricadé dans une chambre avec ses enfants et petits-enfants, menaçant les agents avec une arme et leur intimant de se retirer. Les policiers avaient dû se replier, face à cette menace directe. Entre-temps, un intermédiaire de l’ancien régime aurait remis 15 millions de francs CFA à la partie civile pour le compte de Kandji, une somme toujours inférieure aux 28 millions en jeu.

En plus de ces actes, Alioune Kandji aurait tenté de discréditer les magistrats et policiers chargés de son dossier, les accusant publiquement d’être affiliés au parti Pastef, ce qui lui vaut aujourd’hui des poursuites pour diffusion de fausses nouvelles et outrages à l’autorité.

Le dossier Kandji, devenu explosif, illustre les dérives possibles en matière de gestion du foncier au Sénégal, et soulève aussi des interrogations sur les limites entre protection institutionnelle, abus de fonction et détournement d’intérêt public à des fins privées. En attendant son audition, l’ancien haut gradé dort en prison.


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